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Y a t-il un pilote dans l’avion ?

L’ID de Boeing

Le marché de l’aéronautique est dominé par la présence de trois acteurs principaux à savoir Boeing (leader avec un C.A d’environ 94 Mds de dollars), Lockheed Martin (C.A de 47 Mds de dollars) et Airbus (C.A de 70 Mds de dollars). Ce domaine représente environ 347,7 milliards de dollars dans le monde, avec une croissance estimée à 2% contre (1,6% en 2016). Par ailleurs, la répartition entre la part de marché civil et militaire est quasi parfaite (50,6% pour le premier, 49,3% pour le second).

Concentrons-nous sur Boeing.

Boeing en quelques lignes c’est :

  • Un constructeur spécialisé dans l’aéronautique civile, la défense et l’espace
  • Une entreprise internationale avec un siège à Chicago et un effectif de 170 000 personnes dans le monde
  • Un panel fournisseurs très large : 1 200 suppliers partout dans le monde
  • Un CA de 89 861 millions d’euros
  • Une entreprise leader sur son marché

 

L’avion sans pilote, l’avion du futur ?

Un avion sans pilote, une initiative qui pourrait effrayer plus d’un voyageur et pourtant il semblerait que Boeing prenne part à cette nouvelle aventure. Cette incroyable idée aurait émergé durant une réunion de préparation du salon aéronautique du Bourget et c’est Mike Sinnett, Vice-président en charge du développement des produits qui en est à l’origine.

D’après Sinnett, les connaissances technologiques dans le domaine des drones permettraient de démarrer une vraie étude sur l’automatisation des aéronefs. La réflexion sur le sujet a probablement été enclenchée depuis un certain moment car le groupe a vraisemblablement déjà réussi à piloter un F16 depuis le sol. Boeing n’en est donc pas à sa première tentative, l’étape cruciale restant tout de même de tester des algorithmes au sein d’un simulateur durant l’été 2017. Mike Sennett espère par ailleurs pouvoir faire voler un prototype l’an prochain.

Le vice-président du développement explique par ailleurs que ces intelligences artificielles seront capables de prendre des décisions cruciales comme l’avait fait Chelsey Sullbenberger en amarrant un A320 sur l’Hudson en 2009. Voici une interview de Sinnett à propos de cette future technologie.

Si la construction d’un prototype semble proche, le lancement des lignes automatisées ne se fera pas avant une vingtaine d’années. Ceci pourrait être un excellent timing, il manquera environ 617 000 pilotes d’ici 2035.

Toutefois, avant le démarrage concret d’un tel concept, beaucoup d’éléments devront être analysés en profondeur. Les plus urgents seront sans aucun doute les aspects sécuritaires (les avions seront-ils maîtrisables depuis une base au sol ?), les régulations du trafic (une augmentation des flux aériens sont à prévoir, complexifiés par ces nouveaux aéronef automatisés), et les compétences actuelles à disposition pour gérer ces changements (d’un point de vue organisationnel mais également métier).

 

Quels impacts ?

Tout d’abord d’un point de vue sécuritaire, nous aurions tendance à penser qu’un avion automatisé permettrait d’éviter l’erreur humaine en cas d’accident, un avion automatisé agira sans conscience ni affect. Certaines catastrophes, comme le crash de la German Wings en 2015 causé par un copilote souffrant de troubles psychologiques, pourraient ainsi être évitées. Les cyberattaques sont aussi un réel problème ; qu’adviendrait-il d’un avion contrôlé par une organisation terroriste ?

D’un point de vue « métier » cela aura également un impact. En effet, les mécaniciens travaillant sur les aéronefs verront leurs taches se modifier, elles seront plus digitalisées. Ces ingénieurs mécaniciens devront donc suivre des formations très techniques. Cela impliquerait également un changement dans le métier des commandants de bord qui deviendraient de hauts décisionnaires au sol plus que des pilotes.

D’un point de vue technique tout n’est pas si simple. Il faut être capable d’assurer une liaison en toutes circonstances avec une base au sol, l’IA se devra d’être sans faille à ce niveau.

Une avancée technologique sur les produits est synonyme de changement, de modification et d’amélioration. On ne peut nier que ce tournant majeur impactera fortement le panel fournisseurs de l’entreprise. Des sociétés comme Boeing se rapprocheront de fournisseurs maîtrisant les technologies de pointes. Pour qu’un robot ou un avion s’autopilote, cela signifierait alors un ajout de capteurs et autres éléments dans les aéronefs. Ce type de matériel permettrait d’éviter un accident comme l’AF 447 qui a chuté en 2009 dans l’Atlantique à cause d’une sonde pitot défaillante. Le futur appareil aurait alors des données sur son altitude et pourrait tout réguler lui-même. Cette théorie s’est visiblement confirmée en mai 2016 ; un pilote de chasse américain a perdu connaissance en plein vol et le système d’IA « auto GCAS » permettant d’éviter les crashs lui a sauvé la vie. Ce système pourrait fortement intéresser les constructeurs.

On peut également aborder le côté organisationnel. Effectivement l’entreprise verra très certainement ses practices évoluer, les interactions entre les acteurs internes changeront, ainsi que le management avec de nouvelles façon de travailler, de nouveaux processus, mais surtout de nouveaux besoins.

Globalement, un changement comme celui-ci aura un fort impact politique. Cela impliquera de lisser totalement le droit aérien et les politiques en matière d’aviation et ce, à une échelle internationale. Un avion reliant Paris à Singapour survole plus d’une quinzaine de pays, si l’un d’eux refuse d’être survolé par un avion sans pilote les itinéraires seront fortement impactés, ce qui pourrait déboucher sur de fortes tensions économiques voir politiques.

 

Des laboratoires spécialisés

Du coté des recherches, certains laboratoires planchent actuellement sur ce nouveau concept d’avions. L’ONERA (office national d’études et de recherches spatiales) est spécialisé en recherche spatiale. Au niveau Européen, c’est le BAE System (British Aerospace System) et son programme « Astraea », programme auquel Airbus defence and space et Thales participent.

Le BAE a déjà bien étudié la question puisqu’en 2013 l’organisme est parvenu à faire voler un jet de 19 places durant 800km sans intervention humaine en vol (intervention durant le décollage et l’atterrissage).

Au niveau international, un laboratoire sud-coréen appelé Kaist, a lui tablé sur un robot pilote appelé « Pibot ». Il s’agit ici d’un robot pilotant l’aéronef comme le ferait un véritable pilote au sein de son cockpit.

Enfin, du côté des Etats-Unis, la Nasa et Aero Environment ont constitué un avion spatial sans pilote ayant atteint 96 000 pieds (+ de 29km), soit un record d’altitude.

Boeing se retrouve dans une course effrénée car les motivations de son concurrent, Airbus, sont bien réelles. En effet, le groupe européen voudrait commercialiser des taxis aériens automatisés sans pilote dans le but de décongestionner les villes. Le constructeur chinois Ethang a quant à lui déjà lancé son taxi drone pouvant transporter une personne. Ce dernier décolle à la verticale et peut voler durant 23 minutes sur environ 3,5km à environ 100km/h. Airbus étant un pionnier dans l’aviation civil, l’entreprise pourrait très rapidement s’insérer sur le marché de l’avion civil automatisé et concurrencer Boeing.

Faut-il que l’homme puisse toujours avoir la main sur les aéronefs automatisés ? Faut-il avoir plus confiance en l’intelligence artificielle qu’en l’humain ? Ces questions sont les plus importantes de notre siècle et des études complexes devront être menées pour y répondre. Quoi qu’il advienne, le marché de l’aéronautique voit de beaux jours se profiler devant lui puisque les extensions de la flotte aéronautique d’ici 2034 sont estimés à 4,7 milliards de dollars.

Ant01n3BRUGALLA

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