En France, dans le cadre du plan national en faveur des énergies renouvelables (2010) les pouvoirs publics encouragent la mise en circulation des véhicules électriques (VE) décarbonés. L’intégration de ces derniers dans le système électrique permettrait d’utiliser leurs batteries comme des réserves importantes de stockages pouvant compenser les fluctuations sur le réseau électrique (chargement des batteries à partir des énergies renouvelables et restitution ultérieure au réseau). Le fait de réinjecter l’électricité contenue dans les batteries d’une voiture électrique dans le réseau électrique durant leur période de stationnement a donné naissance au terme « Vehicule to Grid » (V2G), littéralement « du véhicule vers le réseau ».
L’impact des VE sur le réseau est important et nécessite donc de bien préparer leur intégration. D’autant plus que celle-ci n’est pas sans difficultés technologiques, organisationnelles et financières. Aujourd’hui, les systèmes de transport intelligent concernant l’intégration des VE au réseau électrique ont commencé à se développer dans certains pays européens, mais la pénétration du marché est encore précoce, présentant au-delà des challenges observés, de grandes opportunités de déploiement.
Le marché du « Véhicule to Grid »
Grâce au stockage d’électricité dans les batteries des VE, le V2G permet d’optimiser la production aléatoire d’énergie provenant des sources renouvelables. En effet, le VE permet aux producteurs d’énergie d’optimiser leurs installations de production, notamment celles provenant d’énergies renouvelables intermittentes (dont l’éolien et le solaire). Le « consom’acteur » lui, achète de l’électricité à un prix compétitif mais il est tenu de brancher son véhicule en fin de journée sur les lieux de stationnement prévus à cet effet.
Au cours des dernières années, certains constructeurs automobiles commencent à réintroduire les véhicules électriques (VE) sur le marché automobile. Toutefois, bien que le nombre de VE augmente de nos jours rapidement, tous ne peuvent pas être intégrés dans le réseau. Afin d’assurer cette intégration, il faut respecter deux exigences : une du point de vue du véhicule et une autre du côté du réseau. Concernant ce dernier, l’accès à des informations sur l’état local du réseau notamment grâce aux compteurs intelligents permet d’optimiser les processus de chargement des VE. L’Italie et la Suède sont leaders au sein de l’Union européenne en termes de pénétration des compteurs intelligents. Par conséquent, dans ces pays, l’opérateur du réseau électrique peut profiter davantage de l’intégration des VE et du réseau dans la mesure où il peut davantage identifier l’état et les besoins locaux du réseau et sa capacité de gestion locale.
Il existe cinq catégories principales de véhicules électriques mais seuls certains peuvent être intégrés au réseau afin de gérer le processus de charge et de décharge, en utilisant les piles comme système de stockage d’énergie. Actuellement, la plupart des véhicules hybrides ne sont pas capables de charger des batteries à travers le réseau. Néanmoins, les constructeurs automobiles remplacent progressivement tous les modèles hybrides par de nouveaux modèles de véhicules hybrides rechargeables qui peuvent être branchés sur le réseau.
En augmentation de 2.6 % par rapport à 2015, le marché européen du VE a enregistré un record en 2016 avec un total de 90.495 exemplaires écoulés. La France se trouve en position de leader avec un total de 27.301 véhicules électriques immatriculés (utilitaires et voitures particulières). Malgré un recul sur le segment des VE, la Norvège garde le Lead en termes de taux de pénétration, d’autant que la diminution des ventes de voitures électriques a été compensée par la forte progression de celles des hybrides rechargeables, passées de 8000 à plus de 20.000 exemplaires.
Sur le segment des VE rechargeables, le Royaume-Uni est en pole position face aux Pays-Bas et à la Norvège. Ce dernier affiche plus de 24000 exemplaires écoulés en 2016 soit une hausse de 45 % par rapport à 2015.
Enfin, avec plus de 300.000 immatriculations en 2016, le segment de l’hybride « non rechargeable » affiche une augmentation de presque 30 % par rapport à 2015. Le Royaume Uni (près de 52 000) et la France (environ 51 000) représentent près d’un tiers des ventes et sont suivis par l’Italie avec un peu plus de 37.000 immatriculations.
Barrières au développement du V2G
Les obstacles technologiques les plus pertinents qui affectent l’intégration de l’EV au réseau ont été surmontés au cours des dernières années. L’infrastructure de recharge actuelle et les réseaux électriques sont capables de gérer le processus de chargement des VE, réalisant ainsi l’intégration VE- réseau. Toutefois, certains des obstacles techniques restants constituent des barrières technologiques non négligeables telles que celles liées au coût de production des VE, leur autonomie, ou encore l’efficacité de la charge de la batterie.
Par ailleurs, les constructeurs automobiles présents sur le segment des VE ne sont pas encore en mesure de développer des économies d’échelle (pour les véhicules et les batteries). Les prix des VE restent donc considérablement plus élevés. Ce facteur constitue ainsi l’une des barrières commerciales les plus importantes qui affectent l’intégration du VE avec le réseau, en plus des problématiques liées aux Business Models des batteries des VE, ou encore à la propriété des données et la gestion de l’infrastructure des coûts liés aux VE.
De plus, le manque de coordination entre les acteurs présents sur le marché des VE retarde le développement de normes standards à l’échelle européenne. De plus, entre partenariat et concurrence, il existe un manque de définition de la relation entre les constructeurs des VE et les « Utilities ».
Enfin, au-delà des barrières technologiques, commerciales, et organisationnels, certains experts avancent que l’intégration des VE au réseau dépend fortement de facteurs sociaux tels que les habitudes des conducteurs, leur nervosité au volant…
Opportunités de croissance du V2G
Malgré ces barrières, certaines stratégies d’amélioration de l’intégration VE-réseau peuvent être menées à l’échelle européenne. Nous pouvons citer par exemple, le lobbying au niveau Européen pour assurer l’interopérabilité des VE et des systèmes de tarification dans différents pays. L’élaboration d’une norme pour l’interopérabilité des différents acteurs de la chaîne de valeur et pour les différentes technologies et protocoles de communication peut également assurer une intégration interopérable des VE au réseau. Enfin la coopération verticale des opérateurs de systèmes électriques (à différents niveaux) avec les constructeurs automobiles, ou la coopération horizontale entre différents opérateurs de réseau peuvent contribuer au développement d’un espace d’information électronique pour gérer de façon plus efficace et homogène les processus de chargement des VE.
Par ailleurs, en plus des opportunités de coopération et de standardisation pouvant s’opérer sur le territoire européen, le développement de techniques d’optimisation de l’intégration des VE au réseau peut redresser les contraintes auxquelles elle est soumise. Il s’agit par exemple de programmes et d’algorithmes robustes permettant de mieux localiser les véhicules grâce à des capteurs, ou encore de mieux gérer les échanges entre les véhicules et le réseau, de façon à ce que ce soit profitable tant pour les consommateurs que pour les « Utilities » tout en gérant le pic de la demande en électricité.