Les VTC ont récemment investi de manière soutenue le marché de la mobilité urbaine et de nombreux acteurs ont émergé, au grand désarroi des acteurs traditionnels. Ces acteurs essaient tant bien que mal de se différencier dans un secteur où la concurrence s’accroit jour après jour. Pour faire face à cette concurrence, Uber innove en permanence et propose des solutions alternatives. L’entreprise américaine a récemment lancé le programme Uber Plus, pour proposer une offre illimitée de trajets pour un montant fixe, ce qui rompt totalement avec le modèle économique traditionnel des taxis et VTC.
Quelle place pour Uber sur le marché des VTC ?
Le marché du transport individuel connait un essor sans précédent depuis les trois dernières années, où coexistent des acteurs traditionnels (taxis, chauffeurs privés) et des nouveaux arrivants (startups). Le marché du transport individuel mondial est estimé à 125 milliards de dollars bien souvent avec un taux de croissance important en fonction du pays.
Vous avez déjà dû entendre parler du leader mondial du secteur, l’américain Uber. L’entreprise possède une flotte impressionnante de plus d’un million de conducteurs répartis dans plus de 500 villes dans le monde ! La notoriété d’Uber n’est plus à refaire, et on parle même aujourd’hui « d’uberisation » dans d’autres secteurs tellement l’entreprise a disrupté le marché traditionnel.
D’autres acteurs font face au leader, comme Lyft aux Etats-Unis, Chauffeur-Privé en France ou Didi en Chine. Uber n’est pas leader dans tous les pays et essaie de se diversifier et d’adapter son offre au marché en fonction de la demande locale. En Chine, l’entreprise américaine a été récemment rachetée par son concurrent direct (Didi) après une bataille féroce sur un marché stratégique qu’elle n’a pas réussi à pénétrer faute de partenaires locaux.
Dans ce contexte, Uber conserve tout de même son avantage concurrentiel en adoptant une stratégie de conquête de parts de marché à travers le développement de concepts toujours plus innovants, mais souvent au détriment de la santé financière de l’entreprise ; en effet, si le chiffre d’affaires de l’entreprise n’a cessé de croître depuis sa création (de 500 millions de $ en 2014 à 2 milliards de $ en 2016) le bénéfice net lui, décroît au rythme des saisons (de -650 millions de $ en 2014 à -1,3 milliards de $ en 2016).
En France, Uber continue de gagner des parts de marché malgré un contexte légal difficile (Uber Pop a été interdit car l’offre représentait une concurrence déloyale à l’activité de taxi), et a annoncé en Décembre 2016 l’augmentation de ses tarifs de 15% afin d’améliorer les conditions des chauffeurs et valoriser davantage leur offre sur un marché qui est le 3ème en nombre de chauffeurs dans le monde. Le contexte juridique reste un frein important au développement des startups de l’économie collaborative, et un concurrent direct d’Uber en a fait récemment les frais : Heetch, qui proposait une offre similaire à Uber Pop de mise en relation de particuliers pour des trajets courts. La société a été interdite de fonctionnement durant 2 ans et les dirigeants risquent une amende importante. Le cadre légal doit donc encore être défini et les entreprises agissant dans ce secteur risquent le même sort qu’Uber Pop ou Heetch.
La stratégie de conquête du marché employée par Uber et ses concurrents rend le marché attractif pour les clients, qui ont souvent un choix confortable pour répondre à leurs besoins. Pour éviter de perdre leurs clients toujours plus exigeants et volatils, la société américaine a récemment lancé une offre aux Etats-Unis nommée « Uber Plus », proposant des trajets illimités à un tarif fixe.
Uber illimité, une offre qui crée de la valeur ?
A l’instar d’Amazon qui a récemment développé le concept Amazon Prime (livraison en 1 jour ouvré, plateforme de films, séries et e-books illimités, stockage de photos le tout pour 49€ par an), Uber a lancé une offre illimitée (Uber Plus) afin d’acquérir mais surtout fidéliser ses clients. Comment fonctionne cette offre ?
L’offre proposée permet au client de voyager autant de fois qu’il le souhaite à un prix fixe. Toutefois, l’offre doit concerner un départ ou une arrivée depuis une zone définie et devra coûter au maximum 20$ (tout dépassement sera à la charge du client). Une phase de test est réalisée depuis cet été aux Etats-Unis, à New-York avec un tarif de 100$ pour 2 semaines ou 200$ pour 1 mois. En parallèle, d’autres tests sont réalisés dans les grandes villes américaines comme des courses de 30$ pour un tarif de 20$ ou la mise en place de tarifs non majorés la nuit pour 49$ par mois.
Cette offre a des points communs avec Amazon Prime dans la mesure où l’offre de services est illimitée et vise à augmenter la récurrence d’utilisation de la plateforme, améliorer la fidélité des clients tout en déployant des services réservés à ces « membres abonnés ». L’offre de fidélité touche aujourd’hui près de 45 millions de clients dans le monde, et s’avère indispensable à la rentabilité du géant d’Internet : avec l’offre Prime, le résultat opérationnel d’Amazon s’élève à 2,2 milliards de dollars alors que sans elle s’élève à… -1,1 milliards de dollars de pertes, ce modèle est clairement créateur de valeur pour l’entreprise !
Si à court terme ce modèle économique s’avère risqué d’un point de vue financier, à moyen terme cela permettrait d’accroître le taux d’occupation des véhicules, fidéliser ses usagers, renforcer ses parts de marché face à des concurrents de plus en plus compétitifs et se rapprocher du seuil de rentabilité qui n’a toujours pas été atteint par l’entreprise. Uber pourrait même se substituer à certains réseaux de transports traditionnels (bus, métro) avec des tarifs compétitifs (3,30$ par voyage à raison de 2 voyages par jour) et un confort / qualité de service au-dessus des transports traditionnels. Uber expérimente déjà cette possibilité dans la ville d’Altamonte aux Etats-Unis, une ville souvent appelée « Uberville », dont les habitants peuvent utiliser Uber comme moyen de transport subventionné par la municipalité. Toutefois ce concept redessine complètement les transports de demain et des questions de légalité, d’accessibilité aux transports et d’égalité posent encore problème. La généralisation de ce type de concept pose un problème car la cible actuelle d’Uber demeure une clientèle très urbaine, avec un niveau de vie confortable, ayant l’habitude de se déplacer en taxi. Un des défis de la firme américaine réside donc dans sa capacité à élargir sa cible mais aussi adapter l’offre aux spécificités locales (clients, marché, réglementation en vigueur). Pour cela, Uber devra capitaliser sur ses erreurs réalisées en Chine où l’acclimatation au marché ne s’est pas réalisée faute de partenaires locaux importants. Enfin, le point de rentabilité ne sera possible qu’après avoir défini un modèle économique viable et créant de la valeur pour le client, pour le chauffeur et pour Uber.
La quête de la profitabilité n’est pas un long fleuve tranquille pour la firme originaire de San Francisco, et elle devra continuer d’innover sur un marché qui croît à une vitesse exponentielle. Cette capacité d’innovation passera par une amélioration continue de son offre-cœur (amélioration de l’application/User Experience, l’augmentation du nombre de zones desservies, les services à bord) mais aussi par la faculté d’élargir son périmètre business vers des offres complémentaires ; à l’instar de Uber Plus, la location de voitures (actuellement en test à Bali), le camion sans conducteur, la voiture flottante à Paris ou les véhicules autonomes) sont des pistes sur lesquelles Uber investit. Nul doute que dans les années à venir, il faudra considérer Uber comme un acteur essentiel de la mobilité urbaine !