En mars dernier, un nombre exceptionnel de régions en France dépassaient le seuil d’alerte de pollution. Parmi les causes relevées par les médias, le transport routier et l’utilisation des véhicules « diesel ». Face à cette situation, le gouvernement a réagis en multipliant les actions d’urgence de lutte contre la pollution.
Des initiatives onéreuses, pas toujours bien perçues… mais aux effets positifs en matière de mobilité citoyenne
Si l’équation environnementale n’a pas fini de se complexifier, il y a aujourd’hui urgence à prendre des mesures fortes pour limiter les effets de la pollution. Tous les acteurs (élus, citoyens, usagers, autorités publiques, transporteurs, opérateurs, offreurs / intégrateurs de solutions informatiques…) semblent avoir compris la nécessité d’une mobilisation collective. Les premières mesures ont vu le jour suite à l’épisode de pollution aux particules : On distingue des mesures « progressives » pour installer un changement en douceur, et des actions « immédiates » accompagnées le plus souvent de mouvements de protestation.
Au mois de mars 2014 à Paris, une 1ère disposition dite « d’urgence » à l’initiative des autorités locales (mairie de Paris, préfecture de Police, région IdF) consistait à rendre les transports en commun gratuits pour inciter les automobilistes à laisser leurs véhicules au garage. Une opération onéreuse d’environ 4 millions d’euros par jour, selon Jean-Paul Huchon, le président de l’autorité organisatrice des transports franciliens (STIF). Cette décision s’est vue complétée par l’extension de la gratuité aux systèmes de location Vélib’ et Autolib.
L’État a également mis en place un dispositif de restriction afin de limiter les effets négatifs du trafic automobile : la circulation alternée. Les objectifs recherchés ? Fluidifier le trafic et améliorer la qualité de l’air. Efficace ? Le bilan est en fait assez mitigé selon les années (Octobre 1997, baisse de 20% des NO² dans le centre de Paris selon Airparif). Par ailleurs les modalités d’application sont souvent complexes à mettre en œuvre (Amendes, immobilisation du véhicule…) et mal interprétées par les usagers. Elles sont en majorité perçues comme répressives et non préventives.
Pour autant, la circulation alternée a considérablement boosté les locations de véhicule et le covoiturage. Tout véhicule transportant au moins trois passagers était en effet autorisé à circuler durant cette période.
Ainsi, le site blablacar a enregistré un accroissement de 17% des offres en IdF, alors que les demandes grimpaient de 42 %. A court terme, on peut légitimement imaginer l’utilisation massive des sites de covoiturage et de location de véhicules entre particuliers comme des solutions alternatives efficaces.
La conséquence de ces nouveaux usages est l’émergence d’un marché de la mobilité citoyenne. Comme en témoigne l’application de covoiturage WayzUp qui offre dorénavant pour les automobilistes une solution de mobilité pendulaire (travail/domicile). À noter que ce système a été récemment récompensé lors du dernier Salon Transports Publics 2014.
Une « Écotaxe » qui de son côté continue à jouer à l’arlésienne
Point d’orgue de ces mesures anti-pollution : L’écotaxe, redevance kilométrique proportionnelle à la distance parcourue et applicable aux véhicules de transport de marchandises de plus de 3,5 tonnes nationaux et étrangers circulant en France sur certaines routes[1]. Les objectifs ? Diminuer les effets négatifs du transport routier par le report modal (transport fluvial, ferroviaire) et contribuer au financement des travaux de rénovation des infrastructures routières.
Reportée à maintes reprises suite aux derniers remaniements ministériels, la fameuse « taxe poids lourds » ou « péage de transit poids lourds », devait subir un nouveau lifting jusqu’à son adoption prévue au 1er janvier 2015.
Le nouveau dispositif prévoyait une restriction du champ d’application (4000 km de réseau routier contre 15000 km dans la version initiale) et des rentrées de redevance moins fortes que prévues (500 M d’euros brut chaque année). Des mesures « immédiates » devaient également venir compléter cette initiative pour remettre sur les rails le segment FRET.
Pour les transporteurs routiers cette taxe impliquait de revoir en profondeur les modes de gestion. En effet il s’agissait de réaliser des économies en menant un examen complet sur la manière de transporter les marchandises. L’objectif était de repenser le modèle en tenant compte des postes de charge supplémentaires générées (carburant, fréquence des tournées, ressources et flotte de véhicules).
En matière d’innovation, le modèle pouvait s’appuyer sur des solutions embarquées de télétransmission d’information (parcours, vitesse, consommation énergétique, durée, comportement du conducteur…) interconnectées au plan de transport afin d’optimiser les tournées et les temps de parcours.
Après de multiples rebondissements, la fameuse « écotaxe » sera finalement suspendue par le ministère de l’écologie et le contrat liant le gouvernement à Ecomouv’ par la même occasion.
Peut-être verrons-nous ressurgir « l’écotaxe » sous une autre forme ? Une expérimentation ?
Et demain ?
Toutes les initiatives anti-pollution restent sur le principe bénéfique pour la communauté. Cependant ces mesures ne s’inscrivent pas dans le cadre d’un plan global et cohérent impliquant les principaux acteurs de la chaîne du transport.
Nous savons que les épisodes de pollution se renouvelleront et l’enjeu sera d’éviter de lancer des actions d’urgence dès que l’on atteint le seuil d’alerte maximal. Dans l’inconscient collectif, ces actions sont souvent vécues comme une contrainte.
Par ailleurs l’examen des principales questions environnementales (véhicule diésel, écotaxe, circulation alternée, zone 30…) doivent se concrétiser par un véritable programme anti-pollution regroupant une série de dispositions concrètes, simples et efficaces.
Il sera nécessaire de déployer de manière progressive ces dispositions à l’échelle nationale sur une durée permettant un retour d’expérience et des ajustements immédiats. Il faudra également étudier un scénario visant à mettre à contribution d’autres acteurs de la chaîne du transport comme les sociétés de concessions d’autoroutes, épargnées jusque là !
[1] Les routes concernées sont celles non soumises à un péage : les nationales et départementales par exemple