Le 26 mai 2020, le gouvernement avait dévoilé son plan de soutien à la filière automobile. Le secteur, fortement touché par la crise du COVID-19, allait bénéficier de 8 milliards d’euros d’aides, d’investissements et de prêts. Depuis, ce plan, dont l’objectif est de rendre le secteur automobile plus compétitif tout en le décarbonant, s’est décliné en actions concrètes. Les mesures en faveur de la mobilité électrique ont notamment une nouvelle fois été renforcées. Comment l’Etat apporte-t-il son soutien au développement du véhicule électrique ?
Des nouvelles mesures et une accentuation globale des aides
L’Etat est un soutien de longue date de la mobilité électrique. Des mesures incitatives sont en effet déjà en place depuis plusieurs années et le gouvernement a décidé de les accentuer pour permettre un véritable essor de la mobilité électrique.
Des aides à l’achat de véhicules
A la suite du plan de soutien au secteur automobile, les aides à l’achat de « véhicules propres » ont été renforcées. Du côté des particuliers, le bonus écologique pour l’achat de véhicules électriques est passé d’un plafond de 6 000€ à un plafond de 7 000€. Un bonus pour l’achat de véhicule hybride rechargeable pouvant aller jusqu’à 2 000€ a aussi été mis en place. Du côté des professionnels, le bonus écologique, après avoir été rabaissé à 3 000€, est maintenant plafonné à 5 000€.
Ces évolutions concernent également la prime à la conversion, avec pour but de la rendre plus accessible. L’Etat a en effet pour objectif d’en faire bénéficier le plus de ménages possibles. Le montant de la prime pour l’achat de véhicules électriques ou hybrides rechargeables reste plafonné à 5 000€ mais ses conditions d’attribution ont été repensées et assouplies. Les critères d’éligibilité pour la mise au rebut de véhicules incluent maintenant les Crit’Air 3 pour les ménages « très modestes » et les Crit’Air 4 pour les autres. De plus, le nombre de ménages éligibles s’est aussi accru du fait de l’augmentation du seuil de revenu fiscal de référence qui passe de 13 500 € à 18 000 €. Ainsi, 75% de la population française est aujourd’hui éligible à la prime à la conversion.
L’Etat continue par ailleurs d’encourager les professionnels à passer à l’électrique. Les véhicules électriques restent exonérés de taxe sur les véhicules de société. Le montant d’économie généré par cette mesure pour les entreprises peut rapidement devenir important. A titre d’exemple, une entreprise possédant depuis 2014 un véhicule diesel émetteur de 230 grammes de CO² par kilomètre mis en circulation en 2009 devra s’acquitter d’une TVS de 5 705€ par an.
En plus de ces mécanismes nationaux, des initiatives locales permettent de maximiser les aides perçues pour un passage à l’électrique. La métropole du grand Paris offre par exemple depuis le 1er juillet 2019 une aide supplémentaire pouvant aller jusqu’à 6 000€ pour l’achat d’un véhicule électrique ou hybride.
Pour l’achat d’un véhicule électrique, chaque français peut donc aujourd’hui bénéficier d’un maximum de 12 000€ d’aides de l’Etat. A cela s’ajoutent des mesures locales qui peuvent encore augmenter le montant de ces aides.
Des aides au déploiement d’infrastructures
Pour permettre le développement à grande échelle des véhicules électriques, la question des infrastructures est primordiale. Des aides de l’Etat accompagne donc ici aussi le déploiement de ces infrastructures.
Le programme ADVENIR, en place depuis 2016, a ainsi été prolongé jusqu’en 2023. Ce programme attribue des subventions pour la mise en place de bornes de recharges en voirie, en entreprises et dans les copropriétés. L’aide varie entre 30 % et 60 % suivant l’accessibilité des bornes. Si celles-ci sont ouvertes à tout public et situées sur la voirie ou dans un parking privé ouvert au public, l’aide atteint 60 %. Suivant ces mêmes critères auxquels s’ajoute la puissance de charge, le montant maximal de prise en charge du coût d’installation varie aussi entre 960 € et 9 000 € HT.
Pour les logements individuels ou collectifs, un crédit d’impôt permet aussi de déduire jusqu’à 300€ du prix du système de recharge installé. Ce crédit d’impôt autrefois limité à 30 % du prix de la borne est passé à 75 % le 1er janvier 2021.
Par ailleurs, depuis la publication de la loi d’orientation des mobilités (LOM) le 26 décembre 2019, le raccordement des bornes de recharge ouvertes au public est pris en charge à 75% par le TURPE.
De même que pour les aides à l’achat, des mesures incitatives locales s’ajoutent à ce cadre national. Dans la région Grand Est par exemple, les entreprises peuvent bénéficier d’une subvention à hauteur 50 % du coût HT du projet plafonnée à 1 000€ par point de charge.
Des aides qui s’intègrent dans une stratégie de l’Etat
Ces mesures incitatives mises en place par l’Etat s’inscrivent dans une stratégie globale d’encouragement à la transition vers des véhicules peu émetteurs de CO2. Le coup de pouce récent du gouvernement accentuant une nouvelle fois la portée des aides s’inscrit lui aussi dans cette volonté de faire passer un cap à la mobilité électrique en France.
En effet, les augmentations des montants des aides mises en place au cours de l’année 2020, dans le cadre du plan de relance du secteur automobile et du renouvellement du programme ADVENIR, sont très souvent limitées dans le temps. Elles ont pour la plupart été majorées en 2020 mais vont être progressivement diminuées pour atteindre des taux plus faibles d’ici quelques années. Pour prendre l’exemple du bonus écologique, les aides vont être diminuées de 1 000 € par an à partir du 30 juin 2021 :
La stratégie de l’Etat semble ici se dessiner, le but étant de stimuler le marché pour rendre la mobilité électrique véritablement accessible. Avec ces aides décroissantes, l’idée est de donner de la visibilité aux acteurs concernés et d’encourager une transition rapide pour profiter au mieux de ces mesures.
Dans ce cadre, on note aussi la promesse de 100 000 bornes de recharges fonctionnelles d’ici fin 2021 faite par l’Etat et le seuil minimum à atteindre de 50 % de véhicules électriques ou hybrides rechargeables pour les véhicules administratifs de service à cette même échéance.
En plus des aides mises en place, l’Etat utilise un mécanisme de sanctions financières, à travers un malus écologique, pour inciter au développement des véhicules électriques. En 2021, le montant de ce malus écologique peut atteindre jusqu’à 30 000 € pour les véhicules les plus polluants. Ce malus permet d’encourager les acheteurs des véhicules les plus polluants à se tourner vers l’électrique. Cela pourrait encourager l’électrification des flottes d’entreprises.
Dans les autres pays, les mesures prises diffèrent parfois du modèle français. Existe-t-il d’autres stratégies gouvernementales pour favoriser la mobilité électrique ?
Un modèle français unique ?
La France mène une des politiques les plus avantageuses vis-à-vis de la mobilité électrique. Les mécanismes de soutien en place accordent des aides parmi les plus importantes d’Europe. Les dernières mesures mises en place par l’Etat confirment cette tendance. La stratégie utilisée se base majoritairement sur des aides à l’achat de véhicules électriques et au déploiement d’infrastructures. D’autres types de mesures existent cependant.En Allemagne, le gouvernement d’Angela Merkel a récemment augmenté les aides à l’achat de véhicules électriques qui peuvent aujourd’hui monter jusqu’à 9 000€. A cela s’ajoute une réduction de TVA, l’exemption pendant 10 ans de « taxe de circulation » pour les propriétaires de véhicules électriques et la réduction de certaines taxes sur les véhicules de société.
Au Royaume-Uni, l’aide à l’achat de véhicules électriques, victime de son succès, a au contraire été diminué et est maintenant plafonné à 2 500 £ (≈ 2 900€). Des mécanismes d’incitations fiscales sont aussi mis en place, ainsi qu’un système de « plaque verte ». Cette plaque verte permet de différencier les véhicules zéro émission et de leur octroyer des avantages tels que l’accès à des zones à circulation restreinte, la gratuité ou des réductions sur le stationnement ou le péage, etc.
Dans l’Union Européenne, 21 pays sur 27 proposent des subventions pour l’achat de véhicules électriques. Néanmoins, ces aides sont souvent couplées à des mécanismes d’incitation fiscale ou d’autres avantages, tels que celui des plaques vertes évoquées ci-dessus. Le modèle français, très axé sur les aides à l’achat, n’est donc pas le seul existant. De quoi s’inspirer de nos voisins ?
Les mécanismes de soutien au véhicule électrique sont en forte augmentation ces dernières années. En France, des aides très importantes ont été mises en place mais celles-ci ont un effet limité dans le temps et ont pour but de faire décoller la mobilité électrique. Le système français est l’un des modèles les plus avantageux mais n’est pas le seul existant. Chez certains de nos voisins européens, les mécanismes d’incitations se basent parfois sur d’autres leviers que les aides à l’achat. Globalement, on observe que de nombreux pays ont mis en place des mécanismes de soutien pour stimuler le marché du véhicule électrique. La question de la pérennité du marché se pose : à quel point le marché du véhicule électrique est-il dépendant de ces aides ? Qu’en est-il de sa tendance future, lorsque les aides diminueront ? Il semblerait que si l’on souhaite que celui-ci reste sur sa dynamique de croissance actuelle, les constructeurs automobiles vont devoir fortement baisser leurs coûts pour que les véhicules électriques restent attractifs lorsque les politiques d’aides gouvernementales seront stoppées.