Le 26 septembre 2016, peu avant l’ouverture du salon de l’automobile à Paris, Renault-Nissan annonce son rapprochement avec Microsoft dans le cadre du développement d’une offre d’applications connectées dans ses véhicules. L’occasion pour nous de faire un tour d’horizon du secteur automobile et des défis auquel il se prépare.
L’Alliance Renault-Nissan
En partenariat depuis 1999, les constructeurs français et japonais ont aujourd’hui une vision conjointe de leurs perspectives d’avenir et misent sur la connectivité de leurs véhicules. Aujourd’hui au 4ème rang mondial des constructeurs automobiles, avec en 2015 8,53 millions de véhicules vendus (contre 10,15 millions pour Toyota, premier du podium), l’Alliance cherche à se différencier de ses concurrents.
Le groupe s’est clairement positionné sur les avancées technologiques et espère ainsi s’imposer davantage, notamment sur les marchés émergents comme en Chine ou au Brésil par exemple. En effet, à travers le monde, l’Alliance a déjà vendu 350.000 véhicules électriques depuis la mise sur le marché de la Nissan Leaf en 2010, qui est le véhicule le plus vendu dans le monde dans cette catégorie. Les deux marques captent donc environ 50% des parts de marchés mondiales des véhicules zéro-émission.
Le secteur automobile et les services connectés : un virement stratégique récent
Un rapide coup d’œil sur les leaders automobiles aujourd’hui montre un fort intérêt pour le digital et les services connectés embarqués. La volonté de mettre l’innovation digitale au service des conducteurs est longtemps restée hypothétique et le développement d’offres commerciales a été largement freiné par un contexte économique difficile. Aujourd’hui, ils veulent se positionner rapidement.
Renault-Nissan n’est pas le seul leader à s’être rapproché de géants informatiques. Par exemple, General Motors a fait l’acquisition de Cruise Automation en mars 2016, fabricant de logiciels d’auto-conduite, ou encore BMW, Audi, et Daimler, qui ont tous trois décidé, sous forme de consortium, de faire appel à Nokia en août 2015. On s’attend donc à une forte concurrence sur le marché de ces « nouvelles » voitures, cependant chacun ne s’est pas doté des mêmes armes au cours du temps.
Si les bénéfices de la connectivité en termes de sécurité et de praticité, sont compris de tous, il est difficile d’imaginer des véhicules aussi innovants et « intelligents » qui ne soient pas respectueux de l’environnement. Or, Renault-Nissan est incontestablement en position de force sur ce dernier plan. Après s’être implanté a
vec succès sur les marchés développés (France , Renault détient 60% des parts de marché des véhicules électriques), ils ont aussi montré un grand dynamisme auprès des marchés émergents. Par exemple avec le lancement de la Kwid de Renault, destinée au marché indien, qui ne coûte que 5.000€ . A titre de comparaison le modèle Zoé de Renault, voiture électrique la plus vendue en Europe, coûte environ 25.000€.
D’ici 2020, le groupe a annoncé une dizaine d’offres de véhicules connectés dont les spécificités ne sont pas encore connues, ni l’intégration ou non dans ces véhicules des technologies les plus respectueuses de l’environnement.
Quels moyens pour réussir ?
La force principale de Renault-Nissan dans cette décision stratégique, est la nomination de M. Ogi Redzic, 45 ans, ingénieur de formation, qui a fait ses armes chez NAVTEQ, Mot
orola, ou encore dernièrement chez Nokia, qui n’est autre que le partenaire stratégique choisi par BMW, Audi, et Daimler pour le développement de leurs programmes « connectés » respectifs.
Concrètement, le partenariat de Renault-Nissan avec le géant de l’informatique Microsoft vise les services Microsoft Azure, offre de cloud utilisée pour la gestion des applications d’entreprise, web, mobiles, ou encore IoT. Le temps passé en voiture serait donc un relais du bureau où on pourrait travailler tout en étant à distance ou optimiser son temps en cas d’embouteillages sur le chemin par exemple. En termes de navigation, des nouveautés du type verrouillage des portes ou pilotage à distance verront le jour.
Le prototype phare, développé par Renault, est la NEXT TWO : un véhicule hyper-connecté auquel on peut déléguer sa conduite. Les spécificités techniques sont impressionnantes comme par exemple des batteries de caméras permettant au véhicule de se repérer de façon autonome dans son environnement ou encore des agréments pour le confort comme des sièges connectés massants. Cependant, pour des raisons de sécurité le véhicule ne peut être utilisé que dans des parkings spécifiques ou sur autoroute en situation d’embouteillages (30km/h maximum, pas de piétons ni de cyclistes).
Quel usage pour les véhicules connectés ?
De nombreuses questions restent en suspens quant à l’intégration de ces véhicules dans la vie quotidienne. Par exemple, en Europe notamment, les initiatives publiques pour limiter la place de la voiture en ville se multiplient et les mentalités commencent à changer : Londres s’est doté d’un péage urbain et Paris organise des « journées sans voiture » notamment. Par ailleurs, le rêve d’une voiture autonome dépend aussi du cadre légal et des règles régissant son utilisation. Les limites d’utilisation de la NEXT TWO de Renault le montrent bien, la technologie a avancé plus rapidement que les infrastructures et les habitudes des consommateurs. Il semblerait que le besoin de masse d’une voiture connectée reste discutable.
Les constructeurs automobiles font face à une situation ou la voiture est toujours un moyen de transport privilégié mais pour lequel les mœurs changent aussi. Pour un acteur comme Renault-Nissan, les différents marchés présenteront des challenges distincts, Les Etats-Unis, la France ou encore la Chine, tous trois des marchés en croissance pour l’Alliance, ne seront pas réceptifs sur les mêmes points.
La voiture connectée est un nouveau produit, qui satisfait plus que le simple besoin de se déplacer, c’est donc sur cette base que va devoir être pensée l’approche client.