Débutée en 2006 par le fret et étendue avec le transport de voyageurs fin 2020, l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire sur le territoire national français est déjà bien entamée. Pour rappel, l’ouverture à la concurrence désigne la politique autorisant d’autres acteurs que la SNCF à commercialiser leurs services tant de fret que de transport de voyageurs sur le réseau ferré national.
De ce fait, cette politique permet la création d’opportunités pour de nouveaux acteurs proposant de nouvelles offres. Les ambitions de ces derniers sont diverses. Pour certains, il s’agit de prendre position dans un marché du ferroviaire européen toujours plus ouvert. D’autres acteurs comme Railcoop ont à cœur de proposer un service publique complémentaire à celui déjà existant et ainsi développer une offre de transport ferroviaire « innovante et adaptée aux besoins de tous les territoires ».
« L’objectif doit être en effet d’œuvrer pour le bien commun et non pour le profit. » Dominique Guerrée, président du conseil d’administration de Railcoop
La coopérative, un projet citoyen pour l’intérêt collectif
Railcoop est une coopérative d’intérêt collectif ferroviaire (SCIC) créée 2019. Elle est issue d’une initiative citoyenne. Une coopérative est définie (par la loi n° 47-1775 de 1947) comme une société constituée par plusieurs personnes volontairement réunies en vue de satisfaire à leurs besoins économiques ou sociaux (Légifrance). Elle fonctionne grâce au principe démocratique « une personne = une voix ». Pour la coopérative d’intérêt collectif la dimension sociale est obligatoire. Effectivement, La SCIC promeut des valeurs collectives et a un double objectif : si elle peut rechercher l’efficacité économique, la dimension sociale est tout autant importante, si ce n’est plus.
Avec pour ambition de redonner du sens à la mobilité ferroviaire, Le projet de Railcoop se divise en trois grands axes :
L’objectif principal de Railcoop est effectivement de donner aux citoyens la possibilité d’être des acteurs à part entière de l’exploitation du réseau ferroviaire français. Pour ce faire, chacun peut devenir sociétaire. Railcoop a rendu la démarche accessible à tous en la dématérialisant via leur site internet. Après quelques clics sur www.railcoop.fr, chacun peut s’investir dans la coopérative. Par s’investir on entend la participation économique via la souscription à des parts sociales. Est poussée également la participation démocratique via les assemblées générales ou cercles de réflexion auxquels chaque sociétaire est invité ou encore la participation militante. Cette dernière comprend la défense des valeurs portées par Railcoop de manière plus globale.
Railcoop compte 10 668 sociétaires (au 17/12/2021) qui partagent ses valeurs. Ils sont réunis dans 5 collèges qui se répartissent équitablement les droits de vote en Assemblée Générale.
Il n’existe pas de profil type de sociétaire. Certains sont animés par les valeurs environnementales portées par la coopérative. D’autres sont sensibles à la mission publique menée par Railcoop ou encore veulent prendre part à un projet ambitieux : la construction d’un nouveau modèle ferroviaire français. Ils sont principalement français mais également étrangers (Europe, Japon, USA etc.).
Outre donner la possibilité aux citoyens de s’exprimer en devenant sociétaires, Railcoop a pour ambition d’opérer une mission publique complémentaire de celle existante. Railcoop a pour ambition de remettre sur les rails des trains sur des lignes dites « secondaires », arrêtées car jugées trop coûteuses.
Plus encore, Railcoop a pour ambition le développement du moyen de transport vert que représente le rail. Effectivement, il est considéré comme un des moyens de transport les moins polluants.
Son offre : Etat d’avancement
Aujourd’hui, la coopérative est déjà présente sur le paysage ferroviaire national. La première ligne de fret de Railcoop est déjà effective. Elle relie Toulouse St-Jory à Capdenac et est en état de marche depuis novembre 2021. De cette date à fin 2021, la coopérative proposait deux allers-retours par semaine, depuis le début de l’année 2022, le rythme est passé à un par jour ouvré. Plus encore, l’offre s’étoffe avec l’ouverture prévue d’autres lignes. Concernant les transports de voyageurs, en décembre 2O22 est prévue l’ouverture de la ligne Bordeaux-Lyon.
Pour en arriver à ce résultat, il a fallu relever plusieurs défis de taille : recueillir les fonds nécessaires ou encore se fournir en wagons et locomotives.
Son modèle économique
En sa qualité de coopérative, Railcoop dépend entièrement de l’apport financier de ses sociétaires. C’est forte de ses 10 668 investisseurs citoyens qu’elle a su rendre possible ses projets. On pense notamment aux 1,5 Millions d’euros récoltés en mars 2021, ils étaient nécessaires à l’obtention de la licence d’opérateur ferroviaire voyageurs. Sans les parts sociales ou titres participatifs (proposés aux personnes physiques) le projet n’aurait jamais pu voir le jour. Effectivement Railcoop ne dépend d’aucune aide nationale ou européenne car elle s’inscrit dans le cadre des services librement organisés et n’est donc pas subventionnée.
Pour se fournir en véhicules, la coopérative a opté pour deux solutions. Elles diffèrent en fonction de l’offre. Pour le fret, c’est la location de locomotives et wagons. Concernant le transport de voyageurs, l’objectif est l’achat de matériel. Deux options sont à l’étude : l’occasion rénové et réaménagé ou le neuf.
Quelles opportunités et défis pour l’avenir
Concernant le fret, l’ouverture de la première ligne en Occitanie a été un succès et Railcoop ne compte pas s’arrêter là. D’autres lignes sont prévues. Ont été cités les trajets Strasbourg – Clermont-Ferrand, Massy – Brest, Saint-Étienne – Thionville, Grenoble – Thionville, Le Croisic – Bâle ou encore Lille – Nantes. L’Autorité de régulation des Transports (ART) a donné son accord à la jeune coopérative. En termes de diversité de l’offre proposée, Railcoop ambitionne de développer des lignes régulières de desserte locale de messagerie et de micro-fret ou encore des lignes de ferroutage (train + transport routier).
Le transport de voyageur est très présent dans la feuille de route de Railcoop. En plus de Bordeau – Lyon, la coopérative a déjà prévue l’ouverture des lignes Thionville – Lyon et Rennes – Toulouse en 2023. Plus encore la coopérative a pour ambition d’implanter des trains de nuit ou encore de développer des lignes longue-distance.
Lignes ferroviaires prévues par Railcoop pour le transport de voyageurs / Source : Dossier de Presse Railcoop Janv – 2022
Aujourd’hui, un des défis auxquels fait face la coopérative est d’atteindre la viabilité économique. Effectivement, tout semble sourire à Railcoop : ouverture de lignes, nombre croissant de sociétaires… Cependant le projet doit subsister économiquement. Aujourd’hui, le financement du capital qui permet l’ouverture de ses lignes et le maintien des activités est assuré par les fonds des sociétaires. Mais être présent sur des lignes très rurales et moins fréquentées en gardant des prix raisonnables peut-il être durable ? Si Railcoop ne cherche pas être rentable, reste à savoir si elle peut parvenir à l’équilibre économique.
Le temps nous le dira. En attendant, la coopérative a déjà très bonne presse tant auprès des entreprises pour l’offre de fret qu’auprès des citoyens pour le transport de voyageurs.