Tandis que la mobilité collaborative ne cesse de s’étendre et de gagner en popularité, les transporteurs historiques peinent à rester compétitifs et à offrir un service répondant toujours aussi bien aux attentes de commodité et disponibilité de leurs consommateurs. Pourtant, plutôt qu’une menace pour les acteurs implantés du secteur, ces nouvelles manières de se déplacer pourraient bien devenir des tremplins dans l’évolution des entreprises, vers un monde où l’usage d’un produit prendrait le dessus sur sa possession. Venant en complémentarité de leur offre actuelle, certains transporteurs nouent déjà des partenariats et rapprochements avec des start-ups du collaboratif à succès, tandis que d’autres se lancent dans le développement de leur propre service.
A économie collaborative font souvent écho nouvelles start-ups du digital et services émergents. Marqués par l’esprit du partage, de la confiance et d’une volonté d’être plus « écoresponsables », les nouveaux modèles économiques caractéristiques de cette économie du partage sont aujourd’hui incarnés notamment par des services de covoiturage et d’autopartage comme Blablacar, Zipcar ou encore Drivy. Ceux-ci proposent des services venant tantôt en concurrence directe avec l’activité des transporteurs historiques, tantôt en complément de ces derniers.
Plusieurs grands groupes ont ces dernières années ainsi commencé à intégrer dans leur offre de transport de nouveaux services de mobilité collaborative, en réponse aux tendances actuelles de consommation. Un début de transition vers un futur caractérisé par l’économie du partage ? Ou tout simplement une volonté – voire une nécessité – de mieux répondre aux attentes de leurs consommateurs ?
Le ferroviaire se tourne vers la mobilité collaborative pour une offre porte-à-porte
Les acteurs de transport ferroviaires en particulier ont beaucoup innové ces dernières années, notamment en matière collaborative, pour tenter de s’adapter aux nouvelles attentes de leurs usagers. Nombre d’entre eux tentent désormais de proposer des offres plus porte-à-porte à leurs consommateurs, à l’image du groupe SNCF, en intégrant de nouveaux services complémentaires à leur offre.
Après son rachat en 2013 de Ouicar, plateforme de location de voitures entre particuliers, SNCF a lancé fin 2014 son propre service de covoiturage courte-distance, sous le nom de iDVROOM. Né de l’acquisition et de la fusion de deux services de covoiturage existant (123envoiture.com et easycovoiturage.com), celui-ci s’adresse aussi bien aux trajets domicile-travail quotidiens qu’aux transports des gares vers les destinations finales des voyageurs. Une tentative de la part du groupe de devenir l’acteur de référence dans le secteur du covoiturage de courte distance ?
SNCF a par ailleurs lancé en 2015 l’application IDpass, permettant aux usagers de réserver sur une seule et même plateforme aussi bien taxis que VTCs, véhicules de location (électriques ou non), vélos en libre-service, ou encore places de parking. Pour consolider cette offre, SNCF s’est associé à plusieurs acteurs connus de la mobilité collaborative, notamment le leader américain de l’autopartage Zipcar, mais aussi JCDecaux et ses fameux Velib’ Parisiens.
Pendant les travaux sur leurs lignes de transport respectives, SNCF comme RATP se sont tournés vers d’autres formes de mobilité collaborative plutôt que de mettre en place des bus de substitution. Pendant les travaux du RER A en août 2015, la RATP s’était ainsi associée à la start-up de covoiturage Sharette pour proposer un transport de substitution à ses usagers. De la même manière, SNCF s’est proposé de rembourser l’intégralité du trajet en covoiturage avec iDVROOM à ses usagers pendant la rénovation du réseau Transilien en 2015.
De l’autre côté de la frontière, Deutsche Bahn a de même lancé son propre service d’autopartage en Allemagne, Suisse et Pays-Bas, avec l’application Flinkster. La réservation d’un véhicule peut ainsi se faire soit directement depuis le site du transporteur ferroviaire, soit depuis l’application dédiée.
Thalys, de son côté, innove avec un service de « covoiturage à 300 km/h ». Sur sa ligne Paris-Bruxelles, le transporteur propose ainsi avec TickUp des billets à près d’un tiers du tarif normal (29€ par billet exactement), à condition d’avoir formé un groupe de quatre personnes, entre amis ou parfaits inconnus, en 48h. Les billets sont ainsi disponibles en ligne entre 7 jours et la vieille du départ, en fonction des disponibilités et taux de remplissage des trains.
Les constructeurs et loueurs automobiles misent sur la courte durée et l’autopartage
Voyant la place grandissante occupée par les transports collaboratifs dans l’économie d’aujourd’hui, nombreux sont les constructeurs historiques commençant à intégrer un service de location ou d’autopartage dans leur offre. Pionnier dans le domaine, Peugeot a ainsi lancé dès 2009 son propre service de location, sous le nom de MU by Peugeot, permettant aux usagers de louer des véhicules pour quelques heures dans près de 70 villes Européennes. En Allemagne et à San Francisco, BMW s’est de même lancé dans la location de voitures directement depuis les parkings de ses concessionnaires. Avec ce service, les consommateurs peuvent, grâce à l’application DriveNow, emprunter une voiture électrique pour une après-midi.
Le groupe PSA, absent du territoire Américain depuis une vingtaine d’années, a par ailleurs annoncé début 2016 son retour aux États-Unis avec un plan stratégique en trois phases, dont les deux premières sont caractérisées par le lancement de services d’autopartage de véhicules électriques. Le constructeur ne se relancerait ainsi dans la vente de véhicules sur le continent que d’ici dix ans.
Les grands acteurs de la location de véhicules se trouvent de même confrontés à une évolution des attentes des consommateurs. Alors que la location s’étendait hier sur plusieurs jours ou semaines, nombreux sont les usagers cherchant aujourd’hui à louer un véhicule pour quelques heures, sans réservation préalable. Le groupe Europcar, leader Européen de la location de véhicules, conscient de la volonté accrue des consommateurs d’avoir un accès simple et pratique à la location, a ainsi investi dans la start-up Française Ubeeqo début 2015, plateforme rassemblant services VTC, location de voiture en agence et en libre service.
Ce rapprochement s’inscrit dans la lignée de l’acquisition de la plateforme d’autopartage Zipcar par Avis dès 2013, une acquisition ayant permis à Avis de diversifier son offre en s’imposant comme un acteur majeur des services de mobilité d’aujourd’hui.
Si les initiatives de lancement de nouveaux services de mobilités sont nombreuses, beaucoup se sont heurtés à la difficulté d’atteindre un seuil minimum d’utilisateurs pour que le service puisse s’étendre suffisamment et soit rentable. D’autre part, la compétition reste pour beaucoup d’entre eux très importante, les nouveaux acteurs se créant rapidement et s’appuyant sur les technologies digitales. Face à tous ces changements, les acteurs historiques cherchent encore leur place, entre maintien de leur offre historique, lancement de leurs propres offres collaboratives, et rapprochements avec des startups émergentes.