Vous êtes-vous récemment rendus à Lyon ou bien avez-vous eu l’occasion d’y prendre une correspondance ? Alors vous n’avez pas pu passer à côté des travaux dont la gare Part-Dieu fait l’objet. Un an après le début du chantier qui sera conduit en deux temps avec une phase de travaux jusqu’en 2023 suivie de l’aménagement, revenons sur les motivations du projet
Comment repenser un nœud ferroviaire congestionné en pôle d’échanges multimodal ?
Les défis majeurs
Le contexte de Part-Dieu
Certes nous ne parlons pas ici des 700 000 voyageurs qui transitent chaque jour à Paris Gare du Nord. En revanche, nous parlons bien des 120 000 qui le font chaque jour à Lyon Part-Dieu, dans cette gare conçue en 1983 pour en accueillir trois fois moins (35 000). Sans parler des prévisions qui sont évidemment à la hausse et indiquent 175 000 usagers quotidiens en 2030.
Il faut dire qu’à la sortie des Trente Glorieuses et du règne de la voiture, il était difficile d’imaginer le succès du TGV et du TER. C’est ainsi que la gare Part-Dieu a pris place dans un quartier déjà structuré (bibliothèque, centre commercial, métro etc.). Ceci explique le manque de lisibilité de ses accès et de l’insertion dans son environnement. Cela dit, l’histoire a voulu la réussite et le développement du train, faisant du nœud lyonnais une composante majeure dans le fonctionnement du réseau ferré national. Ce sont plus de 1 150 trains qui y circulent chaque jour, dont presque la moitié de la flotte TGV nationale, pour des trafics locaux, régionaux, nationaux et européens. Part-Dieu est ainsi la première gare de transit de France.
Trouver des solutions à la saturation
Afin d’améliorer le fonctionnement de ce nœud, une 12ème voie va être créée. La voie L contribuera à augmenter la capacité d’accueil des trains en gare et permettra aussi de diminuer le nombre de croisements de trains en avant gare, générateur de nombreux retards.
Grâce à la construction de trois nouvelles galeries, la gare doublera de surface. A l’Est, côté Villette, une première galerie longera la future voie L et permettra d’atteindre la navette aéroport Rhônexpress ainsi que la gare routière.
Amélioration des connexions entre modes de transport existants
165 000, c’est le nombre d’usagers des transports en commun à Part-Dieu aujourd’hui, 300 000 d’ici 2030. Il faut dire que l’offre est variée avec tramways, Rhônexpress, métro B, bus, trolleybus C3 et la gare routière.
Mais cette offre est mal connectée à la gare. On sort côté Villette et on se retrouve à devoir franchir la voie des taxis, puis des trams et du Rhônexpress pour pouvoir enfin accéder à la gare routière. Le projet vise ainsi à améliorer les conditions d’accès pour l’ensemble des modes doux, tout en maintenant une bonne accessibilité de la gare en voiture. L’offre sera également développée avec la création de 2 000 places de stationnement pour vélos, en plus des vélo’v lyonnais. Un nouveau parking loueur de 721 places verra le jour et permettra de rassembler l’offre automobile locative. Son bâtiment sera habillé d’une façade végétalisée. Finalement, l’intermodalité sera facilitée par une lecture plus intuitive du passage d’un mode de transport à l’autre.
Conforter l’attractivité économique de la Part-Dieu
Avec ses 2 500 entreprises, Part-Dieu est le deuxième pôle tertiaire français. Historiquement développé autour des activités de banque, assurance, services et administration, Lyon Part-Dieu devient un lieu où l’on produit et expérimente la ville de demain, intelligente et performante.
Le défi est donc de développer une offre immobilière neuve ou réhabilitée qui soit adaptée à différents types d’entreprises. La « skyline lyonnaise » bénéficiera d’un environnement hyper connecté avec un cadre propice au développement de ses entreprises (hôtels, restauration, lieux de séminaires, de réunions etc.).
Recomposition de la gare en ensemble urbain
Ouverture sur le quartier
Le développement des connexions de transports à l’Est et à l’Ouest de la gare a contribué à en faire un lieu de simple passage; ainsi, 30 000 personnes traversent la gare chaque jour. La nouvelle galerie Pompidou ouvrira la gare vers le Sud, quartier où se développent des logements, équipements et bureaux. Cette nouvelle entrée améliorera nettement le confort de la traversée piétonne du passage sous voie.
A l’Est, côté Villette, la gare s’ouvre sur la Place Francfort. Son réaménagement vise à en faire un lieu exemplaire de pôle d’échanges multimodal avec accès aux trams T3 et T4 ainsi que le Rhônexpress. Son caractère piéton sera renforcé pour en faire un lieu agréable en sortie de gare, ombragé par une forte végétalisation.
A l’Ouest, côté Vivier Merle, la gare s’ouvre sur la Place Béraudier. Le projet est ambitieux et consiste à créer une place plus grande sur deux niveaux mieux connectée à son environnement. Dressé au beau milieu du parvis, le bâtiment B10 a trop longtemps rompu cet espace, pour être finalement démoli en 2015. Deux percées donneront accès au niveau inférieur, baigné de lumière on y trouvera la station de vélos, une station de taxis et un nouvel accès au métro.
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La To-Lyon
Située au sud de la Place Béraudier, cette tour d’une surface totale de 80 000 m2 et de 170 mètres de haut verra le jour en 2022. Elle accueillera des bureaux, un hôtel 4 étoiles ainsi que des commerces et des services. Elle se veut devenir le nouvel emblème lyonnais. La proximité d’un hôtel d’un tel standing avec la gare et le quartier d’affaires assoit la volonté d’en faire un lieu économiquement dynamique.
L’expérience voyageur repensée
Des services adaptés, au plus près des attentes des voyageurs
En dehors des services de la To-Lyon, la gare elle-même va s’équiper. La plupart des commerces et services actuels seront basculés vers les galeries. Par exemple, la galerie Béraudier, conçue sur trois niveaux, accueillera des commerces en rez-de-chaussée, des espaces de vente au 1er étage et des restaurants et centre d’affaires au 2nd niveau.
L’offre comprendra des commerces de flux pour voyageurs et passants mais aussi de la restauration. Pour l’architecte urbaniste François Decoster, l’idée est qu’un employé du quartier de Part-Dieu puisse se dire « pourquoi ne pas aller déjeuner à la gare aujourd’hui ? ».
Réinventer les mobilités
Si la désaturation de la gare est l’objectif premier de ce grand projet, il demeure aussi essentiel de mieux intégrer l’offre multimodale à ce lieu et de mieux l’équilibrer. A ce titre, l’objectif fixé pour 2030 est d’opérer plus d’un tiers des déplacements en transports en commun et au moins 10% à vélo (contre 2% seulement aujourd’hui).
Le Sytral (Syndicat Mixte des Transports pour le Rhône et l’Agglomération Lyonnaise) prévoit divers aménagements qui permettront l’amélioration de l’offre des transports en commun : des rallongements de rames de tramways en fonction de l’évolution du trafic ainsi que l’automatisation de la ligne de métro B, ce qui en augmentera sa fréquence.
Les gares françaises sont en train d’opérer leurs transformations, à l’instar de la Gare du Nord à Paris. A Lyon, Part-Dieu sera rapidement suivie de la gare de Lyon Perrache. La ville semble mettre l’accent sur la multimodalité pour créer une expérience de voyage intuitive de bout-en-bout.
Avant-gardiste, la métropole l’a été sur ce sujet avec Optimod’Lyon, une application qui se voulait offrir une mobilité « sans couture ». Aujourd’hui, Onlymoov’ permet d’optimiser son trajet et promeut d’autres modes de transports comme réelles alternatives. Ce calculateur en temps réel d’itinéraires multimodaux proposé par la métropole de Lyon comprend une offre de transports en commun, vélo, covoiturage, location de voiture et TER.
L’expérience a montré que la multimodalité est en fait l’affaire de l’ouverture des données. Les métropoles comme Lyon parviendront-elles à tirer la part belle de la future Loi d’Orientation sur les Mobilités (LOM) attendue pour début 2019 ?