Le réseau de transport de Séoul est aujourd’hui considéré comme l’un des tout meilleurs au monde (cf ici, ici, ou encore là). Le gouvernement municipal a même reçu des prix d’excellence, notamment en 2011 de la part de The International Association of Public Transport, et en 2013 par The Intelligent Transportation Systems Society. Pourtant, au début des années 2000, la satisfaction des citadins vis-à-vis des transports publics était très basse.
La croissance de la population et du pouvoir d’achat au cours des décennies précédentes avait entraîné une explosion du nombre de voitures particulières (3 millions de voitures pour 10 millions d’habitants). La conséquence fut un trafic très dense, et donc un réseau de bus peu performant. Pour y remédier, le gouvernement a lancé en 2004 une réforme profonde du système des transports publics. Cette réforme à grande échelle a mis l’accent sur l’innovation et les services aux voyageurs. Elle a permis d’améliorer considérablement les différents types de transports publics à Séoul, comme le montrent les cas concrets développés ci-dessous.
Les Transports à la carte
La carte T-money est une illustration particulièrement frappante de cette réussite. Il s’agit d’une carte de transport rechargeable à la manière de l’Oyster Card pay-as-you-go à Londres. En passant sa carte sur une borne, la somme correspondant au trajet est automatiquement déduite du solde. La T-money utilise des fréquences radio, ce qui permet de reconnaître la carte jusqu’à cinq centimètres de distance, et en moins d’une demi-seconde. Elle est utilisable non seulement sur tout le réseau de transport urbain, mais également dans les taxis, pour des trajets en train hors de Séoul, et même dans de nombreux commerces de proximité (les fameux « convenience stores »).
De plus, son introduction a rendu possible la refonte du système tarifaire. Celui-ci fonctionne désormais sur la base de la distance parcourue, et a permis aux usagers de réaliser des économies substantielles (environ 410€ par personne et par an !).
La carte T-money est aujourd’hui adoptée par la quasi-totalité des voyageurs sur le réseau de métro et de bus de la ville, et est utilisée pour près de 60% des courses de taxis. Cela représente plus de 15 millions d’utilisateurs à Séoul et dans les villes adjacentes de la province du Gyeonggi, et 43 millions de transactions par jour.
(Re)Donner envie de prendre le bus
Un autre aspect des transports publics qui a été profondément transformé suite à la réforme de 2004 est le réseau de bus, devenu aujourd’hui un modèle du genre. L’opération est désormais « quasi-publique », à savoir que la ville gère les itinéraires et les recettes, tandis que l’exploitation des bus est prise en charge par des entreprises privées.
En outre, tout a été fait pour rendre les trajets en bus à la fois plus efficaces et plus agréables. Les voies réservées qui ont été créées sur plus de 115km (avec des extensions prévues qui doubleront cette longueur) ont permis une augmentation de 30% de la vitesse moyenne des bus. De même, les terminaux de bus construits au niveau des grandes stations multi-modales ont conduit à une diminution drastique des temps de transferts. Pour aller de pair avec cette efficacité retrouvée des bus, il fallait que l’information des voyageurs soit à la hauteur. Ainsi pour clarifier leur fonctionnement, les lignes de bus ont été regroupées en quatre types (trunk, feeder, inter-regional, et circular), et chaque type est associé à une couleur spécifique de véhicules.
En outre, les abribus, tout comme de nombreux médias dont les smartphones, permettent depuis longtemps de connaître le temps d’attente avant le bus suivant. Enfin, des bus électriques ont été introduits dès 2010, et les véhicules sont rendus accessibles aux personnes à mobilité réduite depuis 2003, ce qui contribue à rendre les bus plus modernes et plus accueillants.
Comment optimiser son temps de transport ?
La satisfaction des voyageurs est un élément clé des transports publics de Séoul, et une des voies choisie pour l’augmenter est d’essayer de rentabiliser le temps de transport. Celui-ci est en effet souvent vu comme du temps perdu, ce qui peut avoir tendance à frustrer les voyageurs. Pour y remédier, Séoul a depuis la réforme de 2004 misé sur la connectivité. Une couverture réseau totale du métro permet en effet à ses utilisateurs de ne pas voir leurs communications téléphoniques interrompues de manière abrupte. De la même façon, les nombreux accès wi-fi et les relais 3G (et maintenant 4G) permettent d’être toujours connecté, et donc de pouvoir profiter de son trajet pour répondre à des mails, ou tout simplement pour visiter ses sites préférés !
Pour gagner encore un peu plus de temps, il est même possible de profiter de l’attente du prochain bus ou métro pour faire ses courses grâce à son smartphone. Il suffit pour cela de scanner, via l’application dédiée, les produits du supermarché virtuel présent sur l’abribus ou sur les parois du quai. Les produits ainsi sélectionnés sont ensuite livrés au domicile dans la journée.
Après avoir réussi à transformer en profondeur ses transports publics pour augmenter le nombre d’utilisateurs et leur satisfaction, Séoul s’attaque désormais à d’autres chantiers. L’un d’entre eux est l’écologie. Une série de mesures dans la veine de l’introduction de bus électriques vise en effet à réduire les émissions polluantes. Par exemple, une campagne incite les habitants à sélectionner un jour de la semaine où ils s’engagent à ne pas utiliser leur voiture en échange de réductions sur les tarifs des péages.
Mais le grand projet actuel Seoul Sharing City vise à promouvoir des initiatives locales et à utiliser des ressources dormantes (temps, espace, talents, biens, informations…). Il dépasse donc le cadre des transports publics pour atteindre tous les pans de la société.