Le Paquet mobilité, ensemble de propositions de la Commission Européenne portant sur le renouvellement des politiques des transports, a été publié entre 2017 et 2018. Ce paquet mobilité, venant confirmer la volonté d’avoir une Europe en mouvement, se divise en trois parties, trois différents volets de réformes (parus en mai 2017, novembre 2017, et enfin mai 2018).
Aujourd’hui, une seule loi du paquet mobilité a pu aboutir, cependant les trois volets permettent déjà de percevoir les changements attendus en Europe, comme en France, dans le secteur des transports.
Le paquet mobilité, composé de trois groupements de textes, est entièrement intégré dans l’actualité de l’Union Européenne. Ces textes ont des implications sur les différents modes de transport, mais aussi et avant tout sur les infrastructures qui permettent de garantir l’unification du territoire. Certaines retombées du Paquet Mobilité peuvent être identifiées, mais demeurent incertaines, et les différentes échéances (fin du trilogue, publication de la loi, vote) restent encore floues.
Le Paquet mobilité, un ensemble de propositions pris dans l’actualité de l’Union Européenne
L’Affirmation grandissante d’une politique européenne innovante face au changement climatique
Aux implications inégales sur les différents modes de transport
Le Paquet Mobilité vise ainsi à transformer en textes législatifs les positions de l’Union Européenne en termes de lutte contre le changement climatique. Dans cet objectif, l’UE va s’atteler à une transformation de l’écosystème des transports : la mobilité en Europe se doit d’être propre, compétitive, connectée et sécurisée – et le Paquet Mobilité est structuré autour de ces quatre grands principes fondamentaux. Ceux-ci doivent permettre d’aboutir à un nouveau modèle de mobilité au sein du territoire de l’Union Européenne d’ici 2025. Le secteur professionnel de la mobilité n’est pas le seul concerné, bien qu’il emploie 11 millions de personnes au sein de l’UE. En effet, les particuliers verront eux aussi des modifications dans leur mode de déplacement quotidien si les différentes propositions de la Commission sont adoptées et promulguées.
Le Paquet Mobilité peut être analysé selon trois principales thématiques. Dans un premier temps, on remarque que le secteur du transport routier intéresse particulièrement les politiques au travers des axes sécuritaire, social et concurrentiel. Dans un second temps, le respect de l’environnement, et plus précisément la lutte contre le changement climatique est traitée à plusieurs reprises dans les trois volets de proposition, mais a une place de choix au sein du second volet. Enfin, l’intermodalité et l’unification des normes liées aux transports au sein du territoire européen sont mises en avant
Un premier volet centré sur l’activité et les conditions de travail des chauffeurs routiers
Le premier volet du Paquet Mobilité repose donc sur l’amélioration des conditions de travail des chauffeurs routiers, ainsi que sur l’unification des normes de travail sur l’ensemble du territoire de l’Union Européenne. Il comprend 8 principaux sujets dont 7 ont débouché sur des propositions de révisions de directives. Les propositions législatives portant sur ce secteur sont proches d’un aboutissement, proposant une unification du temps de travail des chauffeurs routiers, un meilleur encadrement des opérations de cabotage, mais aussi une nouvelle surveillance de la vitesse visant à rendre les routes plus sûres. Ces propositions doivent permettre à terme en France de répondre à la baisse du nombre de chauffeurs routiers qui souffrent de la concurrence notamment des pays de l’Est de l’Union Européenne. Comme l’indiquait le député européen Dominique Riquet dans un entretien avec Ouest France, « Le pavillon français du transport routier international s’est réduit de plus de 50 % en dix ans. »
De nouvelles normes et infrastructures attendues dans les prochaines années
Le Paquet Mobilité souhaite modifier plus globalement les transports européens, en instaurant de nouvelles normes, limites et infrastructures permettant de réduire à terme les émissions de gaz à effet de serre. Le second volet se concentre sur ces problématiques en proposant : de nouveaux objectifs de réduction des émissions de CO2 à horizon 2025 (et 2030) ce qui comprend notamment de nouveaux standards de pollution pour les véhicules particuliers – afin que les investissements commencent à se faire le plus tôt possible ; une directive sur les véhicules propres, permettant aux appels d’offres publics de se concentrer sur une offre de mobilité propre ; la révision de la directive sur les transports combinés visant à renforcer l’utilisation du fret (maritime et ferroviaire) en complément des transports routiers pour le transport de biens ; et enfin l’initiative batterie qui met l’accent sur la capacité de l’Union Européenne à se présenter comme territoire d’innovation et fournisseur de solutions dans le cadre des recherches sur les nouvelles batteries (électriques, hydrogènes) qui révolutionnent et révolutionneront le secteur des transports. En parallèle de ces initiatives visant à faire diminuer l’empreinte écologique des pays Européens, le second volet du Paquet Mobilité cherche également à unifier le territoire européen. Cela passe notamment par une directive sur les services de car européens – venant offrir des services de transport longue distance à faibles coûts et moins polluants que les véhicules particuliers, ainsi que par un plan d’action et d’investissement pour le développement transeuropéen d’infrastructures liées aux carburants alternatifs. Ce principe d’unification du territoire européen se retrouve fortement exprimé au sein du troisième volet de propositions du paquet mobilité.
Une mobilité connectée, sécurisée et propre, fort moyen de lutte contre le changement climatique
Ce troisième et dernier volet du Paquet Mobilité se concentre sur la question de la mobilité connectée et sécurisée, qui doit bien évidemment demeurer une mobilité propre. L’Union Européenne souhaite être en avance dans les secteurs clés de l’économie et de l’industrie, et cela passe notamment par le renouvellement de sa mobilité. Comme présenté au sein du second volet du Paquet Mobilité, l’objectif premier est d’unifier le territoire – une politique portant sur une mobilité plus connectée doit pouvoir être garantie de la France à la Roumanie en passant par la Croatie. Ainsi, le troisième volet annonce des objectifs généraux (triple zéro en 2050 : émissions, congestion et accidents) sans proposer de mesures très précises. L’Union Européenne agit en faveur de ces mesures, mais elles ne font pas partie du Paquet Mobilité. Ainsi, la question du déploiement des Systèmes de Transport Intelligents et Coopératifs (STI-C) a notamment été traitée par l’Union Européenne au travers du règlement délégué complétant la Directive 2010/40/UE de 2019, visant la compatibilité, l’interopérabilité et la continuité du déploiement et de l’utilisation opérationnelle des STI-C.
Faire réduire la pollution des transports routiers, favoriser le fret et le transport combiné
En conclusion, on remarque que la Paquet Mobilité de l’Union Européenne met principalement l’accent sur le renouvellement du secteur des transports routiers. Les autres modes de transport (ferroviaire, maritime, mobilités individuelles douces) ne sont pas totalement absents des propositions, mais apparaissent principalement lorsqu’il est question du transport combiné, et du renforcement du fret. Cette prise de position semble relativement logique à la vue du constat suivant : le transport routier est à l’origine d’1/5ème des émissions de gaz à effet de serre de l’Union Européenne et de 5 millions d’emplois pour les européens. L’Union Européenne ne peut pas condamner le transport routier, mais le modifier afin qu’il s’adapte aux exigences de l’Accord de Paris – cela passe notamment par de nouveaux standards d’émissions (proposer dans le troisième volet du Paquet Mobilité), de nouveaux modes de circulation (surveillance de la vitesse par les tachygraphes, meilleure connectivité des véhicules) et par des complémentarités ne venant pas détruire des emplois (fret maritime, ou ferroviaire).
Impliquant des échéances et retombées encore incertaines
Aujourd’hui, presque trois ans après la publication du premier volet du Paquet Mobilité, où en est l’Union Européenne ?
La procédure législative ordinaire de l’Union Européenne explique le temps long entre la parution d’une proposition et son adoption définitive. Dans le cadre du Paquet mobilité, les négociations se sont souvent faites en trilogues, qui se déroulent durant de longues périodes. Aujourd’hui, seul un sujet a été définitivement traité par l’Union Européenne, et d’importantes mesures du premier volet du Paquet Mobilité sont en passe de devenir des textes de lois. Parue le 29 mars 2019 au Journal Officiel, la Directive (UE) 2019/520 concerne l’interopérabilité des systèmes de télépéage routier et permet de faciliter l’échange transfrontière d’informations relatives au défaut de paiement des redevances routières dans l’Union. La mise en place de cette directive permet de garantir l’interopérabilité des systèmes au sein du territoire de l’Union Européenne et donc d’unifier ce dernier. Le premier volet du Paquet Mobilité est également sur le point d’aboutir. C’est notamment le cas de trois thématiques clés : le détachement des travailleurs ; le temps de conduite et de repos, et enfin le cabotage et l’accès à la profession et au marché.
Le 12 décembre 2019, le dernier trilogue portant sur ces trois points importants du premier volet du Paquet mobilité a finalement abouti. Dans un premier temps, la modification du règlement 561/2006 sur les temps de conduite et de repos des chauffeurs routiers implique que l’actuelle période de référence hebdomadaire de 90h de conduite sur deux semaines est maintenue comme règle générale. Le conducteur en transport international est obligé de rentrer chez lui chaque 3 semaines. Les chronotachygraphes intelligents seront mis en place en 2025 pour les camions engagés à l’international ce qui permettra des contrôles beaucoup plus efficaces. Enfin, le repos hebdomadaire en cabine est désormais clairement et strictement interdit.
Dans un second temps, les règlements 1071/2009 et 1072/2009 sur l’accès à la profession et au marché ont été modifiés, ce qui implique l’introduction d’une période de carence de 4 jours pour les opérations de cabotage. Une infraction aux règles du cabotage et du détachement pourrait mener à la perte des licences communautaires. Dans le cadre du transport combiné, les pré et post-acheminements routiers sont soumis aux règles du cabotage. Chaque véhicule devra retourner dans l’État membre d’établissement au moins chaque 8 semaines. Le détachement des travailleurs appliqué au transport routier a été modifié : le détachement s’applique au cabotage, à la partie route du transport combiné, et au transport international. Enfin, les véhicules utilitaires lourds (de 2,5t à 3,5t) de transport international se voient également contraints à l’installation d’un chronotachygraphe intelligent. Ils se voient soumis aux mêmes règles d’accès à la profession que les poids lourds dès lors qu’ils roulent à l’international.
Les prochaines étapes avant la parution des textes au Journal Officiel sont : l’adoption du texte juridique par le Conseil, le vote du texte en commission TRAN (possibles amendements), et enfin le vote du texte par le Parlement Européen en séance plénière (possibles amendements). Certains spécialistes prévoient l’aboutissement des textes en Juin 2020, or la crise actuelle du Covid-19 pourrait repousser les votes à 2021.
On remarque ainsi que l’aboutissement du premier volet du Paquet Mobilité est envisageable avant la fin de de l’année 2020. Cependant, il n’en va pas de même pour les autres volets du Paquet Mobilité, même si ceux-ci portent sur la lutte contre le changement climatique, présentée par l’Union Européenne comme une de ses priorités. Il est toutefois intéressant de noter que le 11 décembre 2019, la nouvelle Commission Européenne a communiqué sur son Green Deal, le Pacte vert européen qu’elle porte comme son principal objectif (ambitieux). Dans ce Pacte Vert, la Commission porte des propositions et objectifs sur le domaine de la mobilité, qui reprennent de nombreux points du Paquet Mobilité. La Commission s’intéresse aux transports intelligents (numérisés) et à la mobilité multimodale. L’objectif est de réduire les émissions du secteur, la congestion des zones urbaines et la pollution. Elle veut donc développer des solutions de Mobility as A Service, via des financements européens. Elle sera également vigilante sur toutes les exemptions fiscales existantes pour ce secteur et mettra fin aux subventions des énergies fossiles. Enfin, les efforts pour faciliter le développement des voitures électriques, et des carburants alternatifs seront soutenus. L’Union Européenne ne revient pas sur ses ambitions en termes de changements de la mobilité, d’unification du territoire et de lutte face au changement climatique, et semble faire des années 2020 – 2021 des années clés de résolution de ces thématiques. Il faudra donc suivre activement les travaux de la nouvelle commission sur ces différents sujets, et analyser les possibles retombées d’ici la fin de 2021.
Principales sources :
- La procédure législative de l’UE
- Le Paquet Mobilité (Publications officielles de l’UE présentant le contenu des 3 volets)
https://ec.europa.eu/transport/modes/road/news/2017-05-31-europe-on-the-move_en
https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/MEMO_17_1445
https://ec.europa.eu/transport/sites/transport/files/mobility-package-factsheet-ii.pdf
- La directive (UE) 2019/520
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32019L0520
- Les Politiques environnementales européennes (Publications officielles UE)
https://ec.europa.eu/clima/policies/ets_fr
https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/climate-change/paris-agreement/
https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/european-green-deal_fr
- Publications (lobbys, articles) sur le Paquet mobilité
https://ue.delegfrance.org/accord-sur-le-paquet-mobilite-dans
https://www.iru.org/where-we-work/europe/europe-overview/european-commission-mobility-package