Au sens de la préservation de la planète, oui très certainement, le covoiturage est une solution de transport durable.
Mais est-ce la principale raison de son fort développement actuel, et cette dynamique est-elle pérenne ?
Bref, ne prenons nous pas des vessies pour des lanternes afin de nous donner bonne conscience ?
La conjoncture actuelle à l’origine du covoiturage
Plusieurs raisons peuvent conduire à des solutions similaires. Il faut donc s’interroger sur les motivations qui portent aujourd’hui l’essor de ce mode de transport.
Les chiffres peuvent impressionner de prime abord. Blablacar atteint 20 millions de membres dans 20 pays, et après le rachat de son principal concurrent européen Carpoolin, Blablacar est devenu le leader d’un nouveau marché, « son » marché.
Les motivations des entrepreneurs de cette solution de transport, comme celles de leurs clients, sont finalement assez claires : pour les uns, il s’agit de créer une source de revenus, pour les autres, de faire des économies.
Cette success story n’aurait pu se réaliser sans la conjonction de 2 facteurs fondamentaux.
L’un, évident, concerne les technologies digitales et leur potentiel de nouveaux services.
L’autre, tout aussi puissant, est très probablement la crise mondiale, synonyme depuis de nombreuses années de précarité de l’emploi, de morcellement du travail, et par suite de recherche du service au plus bas prix et de revenus complémentaires.
Une crise qui érode les liens sociétaux en place et pousse l’individu à subvenir par lui-même à plus de besoins.
Plus largement, la crise a contribué à l’émergence de modes de transport innovants
Paradoxalement, la crise a ainsi permis à de nouveaux business model d’éclore et de prendre une réelle ampleur dans les transports, en stimulant l’innovation.
Elle est aussi devenue une nécessité suffisante pour imposer des changements d’habitudes de vie à de nombreux individus. Nous pourrions évoquer l’exemple de l’essor des VTC, et tirer les mêmes conclusions : précarité de l’emploi, besoins de revenus complémentaires, statut d’autoentrepreneur (issu d’une volonté de relance de l’emploi) en sont aussi les fondations.
Un fait intéressant à noter ici, est que ces compagnies de VTC ont bousculé en même temps nos traditionnelles compagnies de taxis. Elles les ont poussées à innover pour combler leur déphasage avec la réalité d’aujourd’hui, économique d’une part (prix « cassé » à certaines heures de la journée) et technologique d’autre part (applications mobiles basées sur la plateforme « Le.Taxi »).
Que penser par ailleurs du développement des lignes de bus sur les trajets internationaux, puis nationaux, lié à l’ouverture des marchés à la concurrence ?
Le bus ne peut concurrencer le train, le TGV ou l’avion sur les mêmes destinations sans une contrepartie pour le client qui soit forte…et financière.
Donc, sauf dans les régions encore mal desservies par les transports traditionnels, point de salut à ceux qui ne miseront pas sur un modèle visant à offrir les prix les plus bas, avec une relation client meilleure que celle de leurs concurrents.
Alors finalement, le covoiturage est-il durable?
Plus généralement, la question peut se poser pour tous ces nouveaux modes de transport «partagés», «participatif», «collaboratifs» (les expressions ne manquent pas).
À moyen terme, et de manière très probable, ils le seront autant que la crise le sera..
Ensuite peut être, les nouvelles habitudes de modes de vie acquises, et une réelle volonté de préserver la planète dépassant la simple prise de conscience, prendront le relais.
La crise est la manifestation brutale d’une rupture des modèles existants, qui n’a su être ni anticipée, ni préparée
A nous maintenant de définir vers quoi cette transformation nous conduira.
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