Dans un futur plus ou moins proche, les voitures seront électriques, connectées et autonomes. Suite aux campagnes de communication des constructeurs automobiles, le véhicule autonome intrigue de plus en plus les consommateurs qui attendent avec impatience l’arrivée de cette technologie de rupture sur le marché pour le grand public. Les opportunités de nouvelles utilisations deviennent infinies et la société se pose de nombreuses questions à ce sujet comme par exemple : que ferait le véhicule autonome s’il se retrouvait dans la situation de devoir choisir entre, sauver les piétons traversant une route et mettre en danger les passagers ou bien mettre en danger les piétons pour sauver les passagers ?
Le véhicule autonome fascine depuis de nombreuses années. General Motors avait réalisé un premier prototype de véhicule autonome (Firebird II) dès les années 50. Nous sommes en droit de nous poser la question suivante : pourquoi la commercialisation du véhicule autonome est prévue pour 2020 alors que le premier prototype du genre date d’il y a plus de 50 ans ?
Pendant que les ingénieurs de General Motors travaillaient sur la conception du Firebird, chez IBM on commençait à créer les premiers ordinateurs qui faisaient la taille d’un immeuble. Plus les années passaient et plus l’on avait de la puissance de calcul dans des ordinateurs compacts. De nombreux projets de véhicules autonomes ont vu le jour dès la fin des années 70, comme le Van autonome de Mercedes en 1986, grâce à la miniaturisation des ordinateurs. L’apport du numérique a été indispensable pour permettre aux constructeurs automobiles de pouvoir se rapprocher de la commercialisation du véhicule autonome 40 ans plus tard. Que manque-t-il aux constructeurs pour commercialiser le véhicule autonome ?
Les objectifs auxquels les constructeurs automobiles se doivent de répondre
De nombreuses expérimentations en Europe et en Amérique du Nord ont lieu sur route réelle et même si aujourd’hui le véhicule autonome est moins accidentogène que le conducteur humain, les constructeurs n’ont pas encore mis sur le marché leurs voitures. Pourquoi ? La première raison est que le législateur n’autorise pas la circulation de véhicule sans que le conducteur n’ait ses deux mains sur le volant. La seconde raison est que les constructeurs automobiles n’ont pas totalement atteint leurs exigences propres de sécurité afin de proposer un véhicule autonome viable.
Aujourd’hui, l’avion est le seul moyen de transport à environnement ouvert où les hommes sont transportés grâce à une intelligence artificielle et cela n’empêche pas que le vol aérien soit le moyen de transport le plus sûr au monde. Les constructeurs automobiles se sont fixé comme objectif d’avoir une mobilité par véhicule autonome aussi sûre qu’un vol en avion avant de pouvoir lancer la commercialisation. Cela implique une probabilité d’accident de 10^(-9), soit un accident par milliard de kilomètres parcourus. Afin de pouvoir atteindre cette probabilité d’accident, le véhicule autonome doit effectuer 250 millions de kilomètres de roulage pour s’assurer que l’algorithme répond bien aux exigences des constructeurs automobiles.
Les freins qui contraignent l’avancement
Le premier frein, pour effectuer ces roulages, est le budget nécessaire pour parcourir les 250 millions de kilomètres. Avec un coût de roulage de 10 euros par kilomètre parcouru, il n’est pas simple pour les constructeurs d’investir autant de ressources.
Le second frein pour atteindre l’objectif de probabilité d’accident souhaité est le temps de pouvoir parcourir 250 millions de kilomètres. Si l’on considère que les zones les plus dangereuses sont les villes, que c’est dans ces zones que le véhicule autonome doit le plus rouler pour valider la probabilité d’accident et que la vitesse moyenne en ville dans les heures creuses est de 30km/h, alors il faudrait plus de 8 millions d’heures pour les parcourir soit 4578 ans si une personne roule 35h par semaine.
Comment les constructeurs automobiles peuvent-ils affirmer que leurs véhicules autonomes seront en vente d’ici 2020 ?
La simulation numérique au secours des constructeurs automobiles ?
Aujourd’hui la simulation numérique est entrée dans les mœurs chez les industriels. Les constructeurs automobiles utilisent la modélisation numérique dans de nombreux cas. La sécurité routière s’est accrue grâce à la simulation numérique. Le prix d’un crash test en conditions réelles étant extrêmement coûteux, il est possible aujourd’hui de simuler de nombreuses situations de collision et de formes de pièces avant d’aller réaliser le vrai test de validation. Comme on peut le voir dans cette vidéo, les modèles de simulation sont très proches de la réalité.
La simulation numérique permet aussi un gain de temps et d’argent grâce au prototypage numérique. On peut prendre l’exemple des simulateurs d’éclairages numériques qui permettent d’intégrer les propriétés physiques de lumière à un éclairage dessiné en 3D et de pouvoir en visualiser la projection grâce à un simulateur immersif.
La simulation numérique facilite la prise de décision grâce aux salles immersives. Avec une immersion en 3D et à l’échelle 1:1, des décisions peuvent être prise concernant le design, l’ergonomie et le choix des teintes des couleurs sans bouger de son fauteuil. La simulation numérique a réussi à digitaliser de nombreux processus dans l’industrie automobile et s’est avérée indispensable à la réalisation du véhicule autonome.
La puissance de calcul s’est fortement améliorée depuis des années. Il est maintenant possible de stocker plusieurs Gb dans notre poche, alors, qu’il y a quelques années il nous aurait fallu un meuble entier. La simulation numérique a réussi à introduire de plus en plus de données dans ses modèles de conduite pour avoir une complexité proche de la réalité. Le défi est aujourd’hui de pouvoir traiter tous les cas qui pourraient avoir lieu dans le monde réel, soit une infinité, pour améliorer le modèle et que le véhicule autonome soit le plus sûr possible.
Le premier axe de développement est la récolte des données cartographiques. Les constructeurs automobiles s’appuient sur la plateforme Here qui permet à 4 véhicules sur 5 en Europe d’avoir une cartographie précise et améliorable de jour en jour.
Une fois que l’on a les données nécessaires et que l’on a réussi à définir quels sont les éléments qui peuvent interagir avec le véhicule autonome, il faut pouvoir simuler toutes les situations possibles à chaque zone de la cartographie du monde. Des stratégies sont alors mises en place pour regrouper toutes formes de routes, intersections, croisements, giratoires et virages similaires pour réduire le nombre d’itérations. Ensuite, la simulation massive intervient pour réaliser tous les cas possibles et le véhicule autonome effectue des millions de kilomètres de roulage. Lorsqu’un « incident de route » a lieu, les équipes de R&D peuvent analyser les données afin d’améliorer l’algorithme et réduire la probabilité d’accident du véhicule autonome. En effectuant des millions de kilomètres de roulage virtuellement on peut réduire considérablement le coût de développement du véhicule autonome.
En plus du gain de temps et d’argent, la simulation numérique permet de réduire considérablement le risque d’accident pour les testeurs. Les défaillances techniques et les cyberattaques sont des situations à risque car il est impossible de prédire ce qui pourrait se passer. C’est pour cela que la simulation numérique nous permet d’avoir un retour sur la réaction du véhicule autonome dans ces situations sans que personne ne soit mis en danger.
Certains experts estiment que la simulation numérique permettra d’effectuer 99% des roulages et qu’il ne restera que 1% des roulages en réel, soit 2,5 millions de kilomètres. Mais la simulation numérique n’a pas dit son dernier mot. Dans certaines étapes du développement du véhicule autonome, on retrouve la partie « Interaction entre le conducteur et le véhicule autonome » qui est considérée comme l’un des scénarios les plus critiques. De nombreux constructeurs automobiles investissent dans les simulateurs de conduites à haute performance pour comprendre au mieux la réaction de l’Homme et réduire au plus la probabilité d’accident avec le véhicule autonome.
La route est encore longue pour assurer une sécurité optimale aux passagers du véhicule autonome. L’apport de la simulation numérique a permis de franchir une étape dans le développement du véhicule autonome et la question n’est plus de savoir si un jour on aura un véhicule 100% autonome mais plutôt de savoir pour quand.