Finie l’amende de 17€ dont devait s’acquitter les automobilistes qui ne payaient par leur stationnement ! Suite à la réforme du stationnement entrée en vigueur au 1er janvier 2018, les collectivités prennent la main pour fixer le montant d’un « forfait de post-stationnement » et ainsi faire de la politique de stationnement l’un des maillons essentiels d’une politique de mobilité territorialisée.
Quelles sont les changements concrets apportés par la réforme ?
Entrée en vigueur au 1er janvier 2018, la réforme du stationnement a été votée en janvier 2014 dans le cadre de la loi MAPTAM (modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles), ce qui a laissé le temps aux communes d’anticiper et de déployer de nouvelles stratégies.
La réforme du stationnement repose sur deux piliers majeurs : dépénalisation et décentralisation. On parle ici de dépénalisation car l’amende d’un montant de 17 € dont l’automobiliste devait s’acquitter en cas de non paiement du droit de stationnement disparait au profit d’un « forfait de post-stationnement ». Ainsi, en cas de non-paiement immédiat de la nouvelle redevance d’occupation de l’espace public, l’usager n’est plus en infraction mais devient redevable de ce forfait dont le montant est fixé par la collectivité territoriale elle-même et non plus par l’Etat.
Il s’agit également d’une mesure de décentralisation car les collectivités territoriales se dotent d’une nouvelle compétence pour la gestion de la politique de stationnement. Elles prennent la main sur un outil efficace de gestion et de pilotage de l’espace public. Elles ont désormais la capacité d’agir à trois niveaux :
- Définir la stratégie et la politique de stationnement
- Fixer à la fois le montant des tarifs et des « forfaits de post-stationnement »
- Confier, si elles le souhaitent, à un tiers de droit privé le contrôle du paiement ainsi que l’encaissement du forfait de post-paiement
Les collectivités territoriales concernées par la mesure sont l’ensemble de celles qui disposent d’un parc de stationnement payant sur voirie. Elles sont ainsi environ 800 à appliquer cette nouvelle réforme.
Quels sont les objectifs poursuivis par la réforme ?
Avant le 1er janvier 2018, les politiques de stationnement en place ne remplissaient pas les objectifs attendus, en termes de contrôle et de dissuasion des usagers. En effet, le contrôle peu récurrent ne permettait pas une rotation suffisante des véhicules en stationnement et profitait à l’installation des « voitures-ventouses » (voitures dont la durée de stationnement dépasse largement le temps autorisé). L’entreprise Indigo, gestionnaire de parcs de stationnement en espace urbain, déclare que 2/3 des automobilistes ne paieraient pas le stationnement et que seules 20% des infractions seraient sanctionnées, ce qui équivaudrait à un montant d’un milliard d’euros perdus chaque année pour les collectivités.
L’objectif affiché par la réforme est de donner aux collectivités l’une des clefs pour mener une politique de mobilité cohérente intégrant à la fois la gestion des transports en commun et l’occupation de la voirie par les véhicules personnels. Il s’agit d’utiliser la politique de stationnement en tant que levier auprès des automobilistes pour les inciter au report modal, c’est-à-dire emprunter d’autres modes de transport que leur véhicule personnel. D’autant plus que le produit du « forfait de post-stationnement » ne sera pas alloué au budget général de la collectivité mais devra servir au financement des politiques de transport respectueuses de l’environnement et d’amélioration de la circulation en accord avec le plan de déplacement urbain.
En ayant un pouvoir décisionnaire direct sur les barèmes tarifaires et le montant du « forfait de post-stationnement » en fonction du moment de la journée ou du quartier, les collectivités peuvent favoriser un temps d’occupation des places de stationnement plus ou moins long. Il est important de noter que le montant du « forfait de post-stationnement » ne peut être supérieur au montant dû par l’usager pour la durée maximale de stationnement. Ainsi, l’établissement d’un barème de tarif linéaire favorisera une occupation longue tandis qu’un barème de tarif à forme exponentielle rendra réticents les usagers à occuper l’espace de stationnement trop longtemps.
C’est par exemple la politique choisie par la Mairie de Paris qui distingue une zone centrale comprenant les 11 premiers arrondissements d’une zone périphérique comprenant les autres. Avant le 1er janvier, le stationnement était limité à 2h en zone centrale pour un montant de 4€ par heure. Aujourd’hui, voici le barème des tarifs applicable aux non-résidents :
La ville de Lyon a quant à elle choisi de fixer ce montant à 60€.
L’augmentation, dans de nombreux cas, du montant du « forfait post-stationnement » par rapport à l’ancienne amende a de quoi rendre la mesure impopulaire auprès des automobilistes. Des dysfonctionnements ont par ailleurs déjà été relevés concernant la verbalisation des automobilistes : certains d’entre eux ont été verbalisés plusieurs fois la même journée et des véhicules de La Poste ont également été visés.
La réforme du stationnement est l’occasion de déployer les technologies de la smart city
L’autre nouveauté de la réforme réside dans le fait que les collectivités vont pouvoir confier à des prestataires privés la surveillance du stationnement et l’établissement des avis de paiement du « forfait de post-stationnement ». La ville de Paris a par exemple choisi de confier le contrôle du stationnement à deux sociétés, Streeteo (filiale de Indigo) et Moovia (filiale de Egis et Transdev), qui se répartissent les 145 000 places de stationnement payantes selon un découpage par arrondissement.
Les collectivités profitent également de la réforme pour moderniser les technologies de signalétique, d’aide au stationnement, de contrôle ou de paiement. Le marché du stationnement est en effet l’un des secteurs où les nouvelles technologies viennent conforter le déploiement de la smart city. Grâce à la mise en place de capteurs connectés, il est possible de connaître en temps réel le nombre et la localisation des places disponibles, de mesurer les taux de rotation des véhicules et de récolter des données qui viendront nourrir les stratégies mises en place par les collectivités. La start-up ParkingMap a imaginé une application indiquant la localisation des places disponibles aux automobilistes grâce à des capteurs placés sur le rebord des fenêtres et les balcons.
De nombreuses villes se sont dotées d’applications de paiement de stationnement qui permettent à l’usager d’éviter le passage par l’horodateur. C’est le cas des villes de Tours, Lille ou Bordeaux dans lesquelles on peut payer son stationnement et le prolonger via l’application Whoosh. Celle-ci est proposée par l’industriel Parkeon qui a par ailleurs passé de nombreux contrats avec les collectivités pour le renouvellement d’horodateurs et le déploiement de technologies innovantes.