Déjà évoqué plusieurs fois dans sur ce blog (ici, ici ou là), le projet Hyperloop continue de faire son chemin. Après l’annonce d’un deuxième essai réussi par Hyperloop One, Elon Musk a récemment déclaré avoir obtenu un accord verbal de la part du gouvernement américain pour la construction d’une ligne qui permettrait relier New York et Washington en moins de trente minutes. Sans accroc, la commercialisation d’Hyperloop pourrait même intervenir dès 2021. Mais à quel public s’adresse Hyperloop ?
Un cinquième moyen de transport… dont les infrastructures sont encore inexistantes
Lors de la présentation d’Hyperloop en 2012, Elon Musk l’avait qualifié de cinquième moyen de transport (après l’avion, le train, la voiture et le bateau. En effet, la technologie qui le sous-tend est radicalement différente des autres moyens de transport existants. Cependant, il possède un point de commun important avec le train : le besoin de créer toute l’infrastructure de transport lui permettant de fonctionner. Il ne s’agit pas seulement de créer l’équivalent d’une gare, mais bien d’un circuit, qui est même imaginé sous-terrain.
Les coûts d’infrastructure seraient donc conséquents, et comparables à la construction d’une ligne de chemin de fer… même si Hyperloop One affirme qu’ils seraient légèrement inférieurs.
L’Europe, un marché non prioritaire pour Hyperloop
L’Europe se caractérise par le fait que de nombreux pays sont rassemblés sur une petite distance. Londres est à moins d’une heure d’avion de Paris, Berlin à moins de deux heures, Kiev à trois heures. Sur des durées aussi réduites, la diminution du temps de trajet devient moins stratégique.
C’est également une région qui se caractérise par un maillage dense des différents types de transport existants : autoroutes, réseau de chemin de fer ancien, aéroports nombreux. Il n’est donc pas certain qu’Hyperloop y trouve une place pertinente, coincé entre le train et l’avion.
L’amélioration de l’expérience des transports passerait plus aujourd’hui par les transports de proximité (renouvellement de flotte, modernisation des infrastructures, amélioration de l’information voyageur) que par un gain de quelques minutes sur des courts trajets… même si l’idée de rejoindre Lyon depuis Saint-Etienne en à peine plus d’un quart d’heure fait rêver ! Enfin, si toutes les grandes villes européennes peuvent être reliées en un temps très court, c’est plus l’accessibilité aux « hubs » de transport qui prend aujourd’hui du temps. C’est d’ailleurs ce qui motive la construction de la future ligne 18 du Grand Paris, qui reliera directement Paris à l’aéroport Charles-de-Gaulle.
Une opportunité pour couvrir de très longues distances ?
Hyperloop One n’envisage ainsi pas de développement en Europe pour le moment, mais vise plutôt l’Afrique ou les Etats-Unis. En effet, les distances aux Etats-Unis ou en Afrique sont telles que la vitesse devient ici un critère important de choix de moyen de transport. Ainsi, le chemin de fer américain reste relativement peu développé. Hyperloop pourrait donc servir de substitution plus moderne et plus efficace qu’un avion ou que les immenses autoroutes de l’ouest des Etats-Unis (par exemple, entre Los Angeles et San Diego)… à condition de pouvoir assumer un important trafic. Actuellement Hyperloop One pense être en mesure de transporter 3000 voyageurs par heure sur un trajet San Francisco – Los Angeles (30 minutes), soit 72 000 voyageurs par jour au maximum. A titre de comparaison, le RER A transporte 1,2 millions de voyageurs par jour en Île-de-France. Inutile de rêver à un trajet pendulaire quotidien pour le moment !
La question du public se pose enfin : avec les solutions de communication actuelles (messagerie instantanée, vidéoconférences…), il est devenu moins critique pour les professionnels de se déplacer à tout moment. Quant au tourisme, il ne vise pas uniquement les grandes villes, qui seraient les premières à être desservies par Hyperloop. La première mise en service prévue en 2021 devrait permettre à Hyperloop de trouver son public.