En 2018, Strasbourg a été élue « capitale du vélo ». Suivie de Grenoble et Bordeaux, la capitale alsacienne est la ville qui recense le plus de travailleurs se rendant sur leur lieux de travail à vélo. En effet, 16% des strasbourgeois utilisent quotidiennement ce moyen de transport pour se déplacer. Si ce taux est le plus élevé de France, il reste tout de même relativement bas comparé à celui de Copenhague, où il avoisine les 50%.
Le « nouveau boom » du vélo
Ces dernières années, nous avons pu observer une augmentation du nombre de vélos circulant dans nos villes. Bordeaux enregistre la plus forte croissance avec un taux de 2% de déplacement à vélo en 1995 à 11,8% en 2015. Le vélo est aujourd’hui en pleine expansion. L’explosion du secteur automobile a fait régresser l’usage du vélo depuis les années 60 mais, depuis 2010, ce mode de déplacement a reconquis le cœur des Français.
Les raisons justifiant de l’augmentation de cette pratique sont diverses. Tout d’abord, l’amélioration de la sécurité, due à la construction de nouvelles infrastructures facilitant l’usage du deux roues (pistes et bandes cyclables, sas vélo etc.), a fortement contribué à démocratiser la pratique du vélo. A titre d’exemple, l’augmentation du nombre de pistes cyclables à Paris et l’introduction du vélo en libre-service sont les principaux facteurs responsables de l’augmentation du nombre d’usagers du vélo. Paris est ainsi le département de France ayant le plus grand nombre de kilomètres de pistes cyclables avec un taux moyen de 2,7 km de pistes pour 100 km².
L’accroissement du nombre de vélo en circulation s’explique aussi par la popularisation de la livraison à vélo opérée par des entreprises comme Deliveroo, Uber Eats ou encore Frichti. La livraison à vélo a pour avantage de réduire considérablement le temps de livraison, de ne pas avoir de problème de stationnement et permet d’économiser de l’argent sur le carburant. Enfin, l’arrivée sur le marché des vélos à assistance électrique (VAE) a permis de convertir de nouveaux utilisateurs et plus particulièrement les 50–70 ans qui rejetaient le vélo en raison de l’effort physique demandé.
Qui dit plus de vélo dit besoin de plus de sécurité…
Qui dit plus de vélos en circulation dit, a priori, plus de risques d’accidents et donc un besoin croissant de nouvelles mesures de sécurité. En 2017, en France, 172 cyclistes ont perdu la vie , une augmentation de 6% par rapport à 2016 mais qui va de pair avec l’augmentation du nombre de vélos en circulation. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la plupart des accidents mortels ont lieu en agglomération. Par ailleurs, d’après l’étude « Parlons Vélo », dévoilée en 2017 par la Fédération nationale des Usagers de la Bicyclette (FUB), la sécurité est le frein numéro 1 au développement de ce mode de mobilité douce.
L’Ifsttar (Institut Français des Sciences et Technologies des Transports, de l’Aménagement et des Réseaux) a identifié les principales causes et circonstances des accidents. Ainsi, dans 70% des cas le cycliste chute seul : après une tentative d’évitement d’un usager (piéton ou ouverture de portière) ou d’un obstacle (trottoir, poteau, véhicule en stationnement, …), après collision contre un obstacle, à la suite d’une glissade ou encore par déséquilibre (chargement, bandoulière de sac). Seulement 30% des accidents impliquent un autre usager de la route, s’agissant le plus souvent d’un conflit de trajectoire (46% des cas).
…Sécurité qui commence par le respect des règles de circulation et des autres usagers de la route
La réduction du nombre de décès et d’accidents passe tout d’abord par le respect des règles de circulation et des autres usagers de l’espace public. Concernant la sécurité des piétons, rappelons que les vélos ont l’interdiction de circuler sur les trottoirs (exceptés les enfants de moins de 8 ans), doivent toujours laisser la priorité aux piétons mais également veiller à ne pas encombrer les trottoirs lors du stationnement des vélos en « free-floating ».
Tout comme les automobilistes, les cyclistes sont soumis au code de la route. Bruler un feu rouge ou emprunter un sens interdit (sauf indication) constituent donc une infraction. Pour rappel, le non-respect du feu rouge peut entraîner une amende allant de 90 à 375 euros (amende forfaitaire majorée en cas d’absence de paiement dans les 45 jours – oui ça pique !). Sans grande surprise, la consommation d’alcool et de drogues sont également passibles de sanctions. Le cycliste a également l’obligation d’utiliser les pistes cyclables et les « sas vélos » quand il y en a.
Il va sans dire que les règles de bon sens comme respecter les distances de sécurité avec les autres usagers de la route (vélos, scooter, voitures, etc), modérer sa vitesse (notamment les vélos électriques et les coursiers à vélo) ou encore limiter les dépassements dangereux (surtout de camions) s’appliquent.
Enfin, si vous demandez autour de vous quelles règles mettre en place face à l’augmentation de la pratique cycliste, une des réponses les plus citées serait sans doute de rendre le port du casque obligatoire. Cependant, la croyance populaire qui veut que le port du casque protège systématiquement contre les accidents peut être remise en question. D’une part, si le casque n’est pas obligatoire (bien que fortement conseillé) c’est parce qu’il ne protège pas contre la plupart des accidents recensés étant donné que 47,5 % des cyclistes blessés sont surtout atteints aux bras contre seulement 17% à la tête. D’autre part, si l’on regarde de plus près les Pays-Bas – pays le plus sûr du monde pour les trajets à vélo- une infime proportion de cycliste porte un casque.
Enfin, aussi surprenant que cela puisse paraitre, il semblerait que plus il y a de vélos en circulation, plus la probabilité d’avoir un accident diminue. Il suffit de regarder (encore une fois !) chez nos voisins des Pays-Bas le nombre de vélos en circulation et le nombre d’accidents. C’est ce que l’on appelle la « sécurité par le nombre » : plus il y a de vélos sur l’espace public, plus ils sont prévisibles par les autres usagers, mieux ils sont vus et le risque d’accident décroit alors. Cette hypothèse se confirme puisque, en France, le nombre d’accidents graves rapporté au nombre de déplacement à vélo a diminué dans les villes où les vélos en libre-service ont été introduit massivement.
Vers l’instauration de formations obligatoires
Tout comme le permis de conduire (voiture), la question des formations obligatoires (cf les scooters 125) et d’un permis pour les cyclistes mérite d’être posée.
Ainsi, dès le plus jeune âge, les futurs cyclistes bénéficient d’une formation puisque le « Permis Cycliste », instauré depuis 2008, sensibilise les élèves de classe de CM2 aux règles de la conduite à vélo. Aussi, des formations ont récemment été mises en place pour les utilisateurs de VAE car étant de nouveaux usagers pour la plupart, ils ne maitrisaient pas forcément ce nouvel outils. Bien qu’à peine un tiers des accidents implique un autre usager de la route, en regardant de plus près l’étude de la FUB mentionnée précédemment, on apprend que seulement « 24% des personnes interrogées jugent le trafic motorisé non gênant et seules 26% se disent respectées par les véhicules motorisés ». Ainsi, une formation destinée aux conducteurs de véhicules motorisés serait aussi envisageable. C’est ce qu’a mis en place l’association Mon Vélo Est Une Vie afin de sensibiliser les conducteurs de deux-roues aux dangers de leur conduite pour les cyclistes, piétons et autres usagers. Par la suite, l’association souhaite convaincre les assurances moto, afin de faire baisser la prime en cas de suivi de la formation.
Et pourquoi pas un permis cycliste ?
Outre les formations, la mise en place d’un permis cycliste dans une optique d’amélioration de la sécurité est aussi à considérer. Rappelons qu’en France, « il ne peut y avoir retrait de points que pour les infractions commises avec un véhicule pour la conduite duquel un permis de conduire est exigé ». Cependant, l’absence de perte de points ne veut pas dire absence de sanction pénale. Ces infractions sont des délits qui conduiront le cycliste au tribunal correctionnel. En l’absence d’antécédent, le cycliste risquera une suspension temporaire du permis, mais si les faits sont commis en état de récidive, il pourra être confronté à l’annulation judiciaire du permis de conduire.
Suite au décès d’un jeune de 17 ans qui circulait en VAE, le ministère des Transports de l’Etat d’Israël a mis en place ce 1er janvier un permis pour vélo électrique. Ce nouveau permis pourra être délivré aux candidats dès l’âge de 15 ans et demi. L’épreuve théorique se compose de 30 questions sur le Code la route, la sécurité à vélo et les droits des piétons. Les nouvelles règlementations prévoient des amendes plus sévères et les cyclistes qui ne seront pas munis d’un casque se verront infliger une amende de 233 euros. D’autres amendes sont prévues, notamment pour conduite en état d’ivresse, usage du téléphone portable, transport d’un passager ou passage au feu rouge.
Ainsi, pour continuer à rouler en sécurité face à l’augmentation du nombre de vélos en ville et l’apparition des VAE, les cyclistes (confirmés et nouveaux) devront faire preuve d’adaptation et, plus que jamais, respecter les règles qui leurs sont imposées. Par ailleurs, d’après le concept de « sécurité par le nombre » expliqué précédemment, le nombre d’accidents devraient diminuer dans les années à venir ! Affaire à suivre…
Bibliographie :
https://civitas.eu/sites/default/files/civitas_ii_policy_advice_notes_03_cycling_walking_fr.pdf