Lors du Consumer Electronic Show (CES) qui s’est tenu à Las Vegas du 6 au 9 janvier 2016, la société chinoise Ehang, spécialisée dans la conception de drones, a fait forte impression en présentant sa toute dernière innovation, le Ehang 184, un drone de transport unipersonnel.
Profitons de cette présentation pour revenir sur ce mode de transport : le Ehang 184 est-il le premier de ce genre? Quel est son avenir dans cette catégorie?
Le Ehang 184 n’est pas le 1er engin de transport unipersonnel volant …
La plus vieille invention de ce type remonte au milieu des années 1950: le HZ-1 Aerocycle, de conception américaine, était un prototype de plateforme volante destinée à la reconnaissance de terrain au service de l’US Army. Une formation de 20 minutes permettait à n’importe quel soldat de piloter cette machine. Faute de fiabilité du produit conçu ayant causé plusieurs accidents, le projet a finalement été abandonnée.
Plus récemment, l’idée a fleuri dans plusieurs esprits de développer un engin volant mixant hélicoptère et moto. Plus précisément en 2014, ce sont 2 initiatives qui ont été lancées autour de ce concept.
Imaginé durant l’été 2014 par une startup hongroise ByeGravity cPlc. pour démontrer les larges possibilités offertes par les drones, Flike (contraction des mots anglais « Fly » et « Like ») a réalisé son premier vol expérimental en mars 2015, suivi de tests complémentaires qui ont confirmé la viabilité du projet. Selon les caractéristiques affichées sur le site du produit, Flike est un engin 100% électrique qui peut voler pendant 60 min à une altitude maximale de 30 mètres, et atteindre une vitesse de pointe de 100 km/h. La société souhaite commercialiser le produit dès 2016.
Au terme d’une campagne Kickstarter ouverte entre juillet et septembre 2014, la société Malloy Aeronautics a reçu près de 90 000€ pour assurer le développement et la validation de son Hoverbike. Contrairement au Flike, cet appareil n’es pas électrique mais consomme de l’essence, disposant de fait d’une plus grande autonomie : 150 km avec un plein de 30 L. A ce jour, aucun planning de livraison du prototype n’est avancé, l’équipe souhaitant privilégier la qualité du produit final à la tenue du planning de delivery. A noter que l’US Army s’intéresse de très près à ce projet, à tel point que le fondateur de Malloy Aeronautics a conclu un accord avec une société d’ingénierie pour la Défense en vue de travailler sur ce sujet. Un digne successeur au HZ-1 Aerocycle?
Mais ne nous leurrons pas, ce n’est pas demain que nous verrons le ciel grouiller d’engins volants de ce type.
En effet,tout d’abord d’un point de vue financier, l’achat d’un tel engin n’est pas à la portée de toutes les bourses. Sur les prix de commercialisation affichés, il faut prévoir 200 000$ (soit 190 000 €) pour s’acheter un Flike. La startup hongroise est d’ailleurs tout à fait transparente à ce sujet, car elle reconnait sur le site de promotion de son produit que c’est avant tout un jouet de luxe, et que son prix sera celui d’une voiture de sport. Pour l’Hoverbike, aucun prix de vente n’est avancé mais nous pouvons néanmoins avoir le coût de fabrication d’une unité, qui avoisine les 55 000€ (matière première et main d’oeuvre).
De plus, le pilotage de l’engin n’étant pas automatique, des compétences avancées en pilotage sont nécessaires, et la détention d’une licence de pilote privé sera très certainement un prérequis pour prendre les commandes.
En conclusion, ce moyen de transport est réservé en quelque sorte à une élite, et nécessite une pris en main longue et difficile.
.. Mais c’est le 1er engin autonome
Contrairement aux 2 initiatives présentées ci-dessus, le Ehang 184 est beaucoup plus proche du design d’un hélicoptère. Composé d’une cabine unipersonnelle de la dimension d’une petite voiture (2 mètres de longueur sur 1 mètre de largeur), il est propulsé par 4 hélices qui lui permettent de voler à une vitesse moyenne de 100 km/h en portant une charge maximale de 100 kg.
Tout électrique, le Ehang 184 nécessite une charge de 2 à 4 heures pour assurer un vol de croisière de 23 minutes, et alimenter ses outils de bord.
Outils de bord indispensables puisque tout est entièrement automatisé dans le drone : en vision passager, le tableau de bord se résume à une tablette sur laquelle l’interface de vol du drone est embarquée. Le passager peut définir la trajectoire du vol (origine, destination, éventuels points d’étape), déclencher le décollage ou l’atterrissage du drone, et activer les options de vol (climatisation et température à bord, ouverture des portes, allumage des feux, …). Pour le reste des opérations de vol, le drone est tout à fait autonome, du décollage à l’atterrissage, en tenant compte des imprévus. Les situations non résolvables par l’ordinateur de bord seront directement traitées au sein d’une tour de contrôle centralisée.
La société chinoise prévoit de vendre dès 2016 les premiers exemplaires de Ehang 184. De même que pour les motos volantes, son achat représente un véritable investissement puisqu’il serait vendu à un prix de 200 000 à 300 000 €…
Finalement, le Ehang 184 est-il un moyen de transport qui a de l’avenir?
Pourquoi pas… Au même titre que les 2 autres appareils, l’autonomie et la vitesse du Ehang 184 lui permettent de couvrir des distances raisonnables dans un contexte urbain, voire interurbain. De plus, le petit gabarit de l’engin n’est pas complètement incompatible avec l’environnement urbain dans lequel il évoluera, puisqu’il fait la taille d’une voiture une fois ses hélices repliées.
Par ailleurs, le fait que ce soit un moyen de transport autonome peut grandement contribuer à son développement : un engin simple à utiliser pour n’importe qui, et qui permet de se rendre en 2 clics d’un point A à un point B, en s’affranchissant des contraintes terrestres (trafic, déviations, absence de route, …).
C’est également cet atout qui peut jouer en sa défaveur : peut-on vraiment s’affranchir du contrôle humain et automatiser complètement le pilotage d’un engin? La sécurité du passager peut-elle être garantie à tout prix, notamment contre les intrusions dans le système de pilotage automatique? (un article apporte un éclairage sur cette question pour les voitures connectées)
De plus, c’est sans compter sur le fait que le drone autonome est la combinaison de 2 innovations très récentes (le drone civil, et la voiture autonome), pour lesquelles les cadres légaux ne sont pas encore stabilisés, et les utilisations grand public mal détourées. Enfin, il faut être honnête, le facteur financier est un frein important à la démocratisation de ce moyen de transport.
Le drone de transport autonome, ce n’est peut être pas pour demain, mais peut-être pour après-demain. Profitons de l’expérience de la voiture autonome et du drone civil pour tirer ensuite les conclusions de la viabilité de ce moyen de transport dans la société d’après-demain!
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