Du 25 au 27 novembre prochain, Air France lance un « Hackathon Priorité Client » sur l’expérience de voyage en cas d’irrégularités. Les participants (externes et salariés Air France) auront 48h pour proposer à un jury composé de responsables et d’un client de la compagnie des idées d’innovation destinées à traiter cette thématique. A l’issue de ce concours, le jury désignera le meilleur projet : à la clé, un billet aller-retour offert !
Ce hackathon s’inscrit dans une tendance de fond chez Air France d’amélioration de la relation client. En effet, dans un contexte très concurrentiel, Air France souhaite se différencier et se positionner dans le haut de gamme grâce à sa stratégie relation client, en faisant de celle-ci un levier de performance et de différenciation. Adeline Challon-Kemoun, Directrice Générale adjointe Marketing, Digital & Communication d’Air France-KLM, explique que la compagnie aérienne a en effet pour objectif de « devenir le groupe aérien leader de la relation attentionnée, depuis la réflexion d’achat jusqu’à l’après vol ».
Un enjeu majeur pour atteindre cet objectif réside dans le traitement des données clients. Air France-KLM l’a bien compris puisque le groupe a annoncé il y a quelques mois la création d’un nouveau département afin de « non seulement collecter, mais aussi centraliser l’ensemble des données clients en vue d’un traitement personnalisé », explique Adeline Challon-Kemoun.
La data comme levier de l’amélioration de la relation client
Bien exploitée et valorisée, l’information client constitue en effet une véritable opportunité pour optimiser la relation client notamment en proposant un service toujours plus personnalisé, et en améliorant l’expérience client.
En l’espace de quelques années, la quantité de données à disposition des compagnies aériennes a explosé. Chaque point de contact avec le client constitue une opportunité de récupérer des données qui pourront ensuite être exploitées. Air France-KLM a bien compris les incroyables possibilités offertes par l’exploitation des données issues de ses quelques 90 millions de passagers par an, et 24 millions de membres pour son programme de fidélité Flying Blue. Les nouveaux médias forment également un important gisement de données pour le groupe : interactions générées sur les sites et applications (une vente toutes les 5 secondes sur Airfrance.com), échanges sur les réseaux sociaux (16 millions de fans sur Facebook, 3 millions de followers sur Twitter), données des campagnes médias.
Avoir un nombre important de données ne suffit pas, il faut également savoir les exploiter correctement. C’est dans cette perspective que le groupe Air France KLM a annoncé en avril dernier, la création d’un département « Customer Data » avec 3 objectifs :
- Développer et capitaliser sur la plateforme Big Data qui centralise tous les données de l’expérience client issues des canaux du groupe
- Coordonner l’ensemble des besoins identifiés au sein du groupe Air France-KLM sur le sujet de la data
- Mettre en place la gouvernance de la donnée (amélioration de la qualité des données, respect de la vie privée, sécurité informatique, data management…)
Les actions mises en place par Air France pour développer la relation client grâce à la Data
En cible, ce département a pour objectif de fournir à la compagnie une vision 360 de ses clients, qui servira d’une part à l’ensemble des collaborateurs pour capitaliser sur la connaissance client et ainsi personnaliser la relation client, mais aussi au client lui-même, car le système sera en mesure de lui proposer des produits en fonction de ses habitudes de voyage.
Pour développer la relation client, Air France va tout d’abord miser sur le développement de nouveaux services pour le client destinés à fluidifier son expérience voyageur : plus d’hésitation au moment du départ, la compagnie proposera d’envoyer des notifications, notamment pour indiquer la localisation du comptoir d’enregistrement, ou de réaliser des opérations en selfcare, telles que l’enregistrement du passager (via l’actuelle borne de check-in) et de ses bagages (via le dépose bagage automatisé), ou encore, pendant le voyage, la localisation en temps réel de ses bagages ou la consultation des titres de presse en vol. Ces nouveaux services selfcare ont 2 objectifs principaux : pour les clients, celui de leur donner un maximum d’autonomie, et pour les agents, de donner au client le maximum d’autonomie, et faire évoluer le rôle des agents dans le parcours client. Le but étant de recentrer les agents sur le relationnel client en limitant leur rôle exécutif pour plutôt développer leurs échanges physiques avec le voyageur. Une série d’initiatives a ainsi été déployée par Air France tout au long de l’année 2016 dans cette perspective. La compagnie aérienne prévoit par exemple d’automatiser 100% des portes d’embarquement d’ici la fin de l’année, et d’équiper l’ensemble des agents au sol de tablettes.
Cette dernière mesure va également permettre de personnaliser la relation client, car la tablette permettra à l’agent d’accéder en temps réel au dossier de son interlocuteur (voyage en cours, historique de la relation client). Carole Peytavin, Directrice Expérience Client Air France, va même plus loin en expliquant que « si un agent rencontre un voyageur en retard pour son vol et qu’il s’aperçoit, depuis sa tablette, que son bagage a été perdu le mois précèdent, il pourra déroger au règlement habituel en accordant à ce client un affrètement sur le vol suivant sans supplément, et ce même s’il ne fait pas partie du programme fidélité ».
Enfin, dans cette même logique de personnalisation de la relation client, Air France va pouvoir capitaliser sur ces données et analyser les profils clients pour utiliser les bons canaux de communication en fonction des profils, et envoyer des offres commerciales ciblées. La compagnie étudie même la possibilité d’atteindre ses clients moins réguliers, et qui n’ont pas téléchargé l’application, par d’autres canaux comme Messenger ou WhatsApp.
Avec ce plan et ces objectifs ambitieux, Air France affiche donc clairement sa volonté de disposer d’un grand volume de données à forte valeur ajoutée, afin de les exploiter de manière ciblée et personnalisée dans le but de devenir un acteur référent dans le concept de « relation attentionnée pour ses clients ». Toutefois, l’action d’Air France s’inscrit dans une tendance de fond chez les grandes compagnies aériennes qui se sont elles aussi saisies du sujet de la relation client à l’ère du Big Data.
Un enjeu stratégique dont les autres compagnies aériennes se saisissent elles aussi
Deux études récentes montrent qu’en matière de satisfaction voyageur, les notions de services prévalent sur la qualité du produit, et que l’individualisation du service est un facteur recherché et valorisé par les clients, mais qui n’est pas encore assez développé par les compagnies aérienne. Les performances perçues en matière d’individualisation du service apparaissent donc ici comme des valeurs à la fois pertinentes et potentiellement très discriminantes sur le marché de l’aérien.
Plus globalement, la relation client constitue un enjeu majeur pour les compagnies aériennes. Celles-ci l’ont d’ailleurs bien compris.
C’est le cas par exemple de Ryanair, qui a initié une transformation de grande ampleur avec pour objectif de mettre le client au centre de l’entreprise. Ce programme répond à deux enjeux majeurs pour la compagnie irlandaise : fidéliser le client et se détacher de son image « low cost ». Le digital et le traitement de la data occupent une place centrale dans cette mutation. En effet, Ryanair a tout d’abord refait son site et lancé une application mobile afin de faciliter la réservation et proposer un parcours d’achat simplifié au client. La compagnie a ensuite créé un espace personnel « MyRyanair », dans le but de faciliter les réservations, mais surtout afin de collecter de précieuses données clients. A la clé, un meilleur ciblage des plans médias et une personnalisation de la communication, et de meilleurs taux de conversion et de rétention. A venir dans les prochains mois, une relation client toujours plus poussée : un site web personnalisé et à l’image du cient, une possibilité de réserver son menu à l’avance, … A quand le choix de son voisin à bord?
A l’instar de Ryanair, Qantas Airlines s’est également illustré comme une compagnie avant-gardiste dans l’exploitation des datas, au travers de son équipe « Insight and Innovation » en charge du développement de modèles prédictifs grâce à ces données. Evidemment, ces modèles permettront de mieux comprendre le comportement du client, et de lui proposer l’offre qui le fera pencher pour un produit Qantas. Parmi les questions posées au modèle, la réponse à la question « quelle est la probabilité qu’un client choisisse Qantas lors de son prochain vol? » reste celle que toutes les compagnies espèrent avoir grâce au Big Data…