TransportShaker

Le blog Transport des consultants de Wavestone

Comment la voiture électrique se fait-elle une place dans les flottes d’entreprises ?

Le contexte actuel de la transition énergétique amène les acteurs du secteur automobile à se transformer, notamment en délaissant le véhicule thermique pour se tourner vers des véhicules plus verts (électrique, hybride ou plus rarement à hydrogène).

Dans ce secteur automobile, celui des flottes d’entreprises est un marché conséquent et en forte croissance. En effet, la moitié des ventes de véhicules neufs est réalisée pour les flottes de véhicules d’entreprises. Dans ce contexte, il est intéressant de comprendre où en sont les acteurs de ce secteur et les opportunités qui se dessinent.

La transformation de ce secteur est par ailleurs portée par des réglementations incitatives ; avec pour les constructeurs automobiles un quota des émissions moyennes des véhicules vendus (de 95g/km de CO2), au-delà de quoi ils s’exposent à de lourdes pénalités financières. Du côté des entreprises possédant une flotte de véhicules, la LOM (Loi d’Orientation des Mobilités) met en place un quota de véhicules à faibles émissions (émettant moins de 60 g/km de CO2) pour les flottes d’entreprises avec, pour 2022, 10% du renouvellement des flottes automobiles qui se doit de ne pas excéder ce quota d’émissions (pour les flottes de plus de 100 véhicules).

L’attrait financier des véhicules électriques

L’électrification des flottes de véhicules devient de plus en plus intéressante pour les entreprises clientes car, au-delà de son impact positif sur l’environnement, de la réduction des coûts d’exploitation, d’entretien et de maintenance des véhicules, les aides gouvernementales font de cette électrification une décision stratégique.

En effet, le coût global de possession d’un véhicule électrique est « 40% moins élevé que pour un véhicule thermique« , d’après Brice Fabry, Directeur Véhicules Electriques de Nissan West Europe, car les coûts de carburant et d’entretien sont plus faibles que pour un véhicule thermique et que les taxes diminuent de plus en plus.

En outre, en France de nombreuses incitations financières ont été mises en place pour accélérer l’électrification des flottes d’entreprises.

Ces incitations financières participent à l’accélération des transformations des business models des acteurs du secteur.

L’adaptation des business models

L’adaptation des business models des loueurs de voitures

L’étude des transformations des loueurs de voitures aux entreprises nous montre que ceux souhaitant se tourner vers des flottes vertes doivent s’approprier un nombre important de nouvelles connaissances et compétences autour de l’écosystème du véhicule électrique : offre de véhicules, infrastructures de recharge, offre de financement …

Par ailleurs, un des freins pour les loueurs, expliqué par Dominique Rolland, gestionnaire de flotte d’un grand groupe français, est la valeur de revente de véhicules qui risquent d’être obsolètes en quelques mois au vu des rapides évolutions du marché. En effet, qui achèterait une Renault Zoé de 1ère génération ayant 150km d’autonomie en pratique alors que les nouvelles en ont quasiment deux fois plus ?

Exemples de nouvelles offres des grands acteurs européens de location longue durée :

Afin d’éviter de se faire devancer par de nouveaux acteurs, les acteurs historiques du secteur doivent rapidement s’adapter.

Concernant ces nouveaux acteurs, Electrolease par exemple, a vu le jour fin 2019. Cette entreprise propose un service complet pour les offres de location longue durée de véhicules 100 % électriques. Ce service comprend le financement, les garanties, l’installation et l’entretien des bornes, des conseils sur la gestion du parc, la possibilité d’emprunter ponctuellement un véhicule thermique pour les longs déplacements.

Ainsi, plus que jamais, l’environnement des flottes automobiles est concurrentiel et les loueurs sont de plus en plus soumis à de fortes pressions dans ce contexte où les autres acteurs se transforment aussi.

L’adaptation des business models des entreprises possédant une flotte de véhicules

Les entreprises souhaitant se munir d’une flotte de véhicules plus verts doivent, elles aussi, s’adapter rapidement pour ne pas subir de lourdes pénalités financières, et à plus long terme soigner l’image de l’entreprise.

Certaines vont faire appel à des gestionnaires de flottes ou revoir leur politique automobile, d’autres vont développer des partenariats avec des startups ou entreprises du secteur.

L’exemple le plus parlant est celui de La Poste, N°1 mondial des flottes d’entreprise électriques, qui a choisi Renault comme fournisseur de ses 7200 Kangoo zéro émission, ce qui correspond à un véhicule utilitaire léger (VUL) sur cinq de leur flotte. Pour La Poste, le mode d’utilisation justifie d’autant plus cette transition avec en moyenne 30 à 40 km parcourus par véhicule par jour et 400 à 450 arrêts réalisés par les facteurs.

Enedis possède la 2ème flotte électrique de France avec 1880 véhicules destinés aux interventions. Cette transformation a aussi été stratégique car l’entreprise se sert aujourd’hui de cette flotte comme d’un laboratoire de la mobilité électrique à grande échelle, lui permettant d’acquérir une expérience réelle du secteur et par la suite de pouvoir capitaliser sur les fonctionnalités offertes par leurs compteurs Linky.

Ainsi, il est stimulant de voir qu’actuellement les lignes bougent doucement et que certains acteurs s’organisent pour redéfinir la mobilité pour les employés en entreprise via l’électrification des flottes de véhicules.

Des perspectives de développement

Une multitude de nouvelles connaissances

Les acteurs du secteur des flottes d’entreprises, tels que les loueurs, les constructeurs automobiles, les entreprises possèdant une flotte, mais aussi de nouveaux entrants sur le marché, saisissent l’opportunité qui s’offre à eux, dans ce contexte de grandes transformations, d’acquérir de nouvelles connaissances pour pouvoir offrir un large panel de services et produits autour du véhicule électrique.

Outre les flottes automobiles, les véhicules électriques impactent aussi tout un écosystème plus large, comme le montre l’exemple du rapprochement d’Air France et de la startup CarWatt. Air France a choisi de remplacer tous les moteurs des tapis roulant pour les bagages par des moteurs électriques usagés provenant de véhicules électriques.

« Vehicule to Grid » (V2G) : Une idée innovante pour rentabiliser sa flotte

Le « Vehicule to grid » (V2G) consiste en l’utilisation des véhicules électriques comme des solutions de stockage d’énergie électrique, permettant de réutiliser cette dernière lors des périodes de forte demande en la réinjectant dans le réseau. EDF s’est emparée du sujet du V2G en s’associant à la startup californienne NUVVE pour créer sa filiale DREEV, avec pour cœur d’activité le développement de solutions V2G.

Cette nouvelle solution permettrait de rendre d’autant plus attractive le véhicules électrique aux yeux des entreprises possédant des flottes d’un point de vue économique. Venant ainsi s’ajouter aux bénéfices engendrés par le faible coût de possession des véhicules, aux réglementations et aux économies de carburant (2€ pour 100 km en véhicule électrique selon l’AVERE, dans le cas d’une recharge à domicile).

Conclusion

Ainsi, les acteurs gravitant autour de l’écosystème des flottes d’entreprises sont à la croisée des chemins, avec des offres très larges, des fiscalités incitatives, des business models à repenser, et des clients à convaincre. Des solutions, comme le « Vehicule to Grid », apparaissent et viennent accompagner le passage des flottes d’entreprises à l’électrique, même si elles ne permettent pas forcément de lever tous les freins. Cette transformation majeure du secteur de la mobilité va naturellement générer un besoin d’accompagnement des acteurs, et ce, à tous les  niveaux de la chaîne de valeur.

Lucie BERTAUT

Consultante énergie & transport

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *