Le 28 novembre 2019, Anne Rigail était l’invitée du Club Les Echos, en partenariat avec les cabinets de conseil Wavestone ainsi que Favart et Pénélope. La Directrice Générale d’Air France est revenue sur le « plan de vol » de la compagnie française pour répondre aux enjeux économiques et environnementaux auxquels cette dernière doit faire face.
« Un objectif de marge opérationnelle à 7-8% »
Le 5 novembre dernier, le groupe Air France-KLM présentait aux investisseurs les orientations stratégiques pour renforcer sa compétitivité. Pour re-dynamiser son état financier à horizon 2024, Air France s’appuie sur un renouvellement et une modernisation de sa flotte. L’arrivée des A350, dont une commande de 10 appareils supplémentaires a été annoncée le mercredi 11 décembre, et des A220 permettrait une économie de 10 à 15% des coûts du siège, ces appareils consommant environ 20 à 30% de carburant en moins. La Directrice Générale d’Air France a également affirmé qu’un travail structurel était en cours sur l’organisation générale de la compagnie : optimisation des processus opérationnels grâce à la digitalisation, travaux sur les achats et sur les coûts d’investissements informatiques. L’enjeu est de taille pour Air France-KLM qui souhaite retrouver une santé financière afin d’assurer de nombreux investissements prévus à court et moyen terme.
« Etre au rendez-vous des attentes de nos clients »
Au cœur de la stratégie portée par Ben Smith depuis son intronisation à la tête du groupe Air France-KLM, l’amélioration de l’expérience client est un objectif essentiel à atteindre selon Anne Rigail.
Cette amélioration de l’expérience client passe tout d’abord par l’arrivée des nouveaux appareils dans la flotte. Sur le long-courrier, les cabines Business des A350 sont équipées de sièges « full flat » (siège pouvant être complètement horizontal) et sont « full aisle access » (permettant un accès direct à l’allée), dans une configuration donc en 4 de front (1-2-1). Les cabines Economy sont également concernées par cette amélioration avec principalement une optimisation du pitch (espace d’assise avec le siège de devant).
Sur le moyen-courrier, la commande de 60 A220-300 renforce la volonté de proposer une cabine moins dense, avec une configuration en 5 de front (versus 6 de front sur les A318-319).
Mais l’amélioration de cette expérience en vol passe également par le renouvellement des cabines, à savoir les projets de retrofit sur les A330 et les B777 opérant sur le réseau COI (Caraïbes Océan Indien). Ces différents projets ont été évalués à hauteur de 1 milliard d’euros.
Pour l’ensemble de la flotte, le déploiement de la connectivité et du WiFi à bord se poursuit, la Directrice Générale d’Air France précise que : « Aujourd’hui, j’entends de moins en moins de clients qui me disent « j’ai envie de rester dans ma bulle » et de plus en plus de clients qui me disent « vous n’avez pas encore installé le Wi-Fi partout ? » ». La digitalisation est également un point fort de l’expérience client, avec une volonté de fluidifier le parcours sol en aéroport. Passage automatique des frontières (PARAFE), reconnaissance faciale, l’objectif étant « que le passeport reste dans la poche du client pour pouvoir avoir un parcours en aéroport sans file d’attente ».
« Nous avons une marque Air France qui génère des attentes assez fortes »
En termes de positionnement, A. Rigail est revenue sur la « montée en gamme » annoncée par Ben Smith à son arrivée : « nos clients attendent une expérience au sol et en vol qui soit au meilleur standard que ce qui existe dans l’industrie aérienne ». Cette offre est notamment associée à la mise en avant d’une « french touch » qui passe par exemple par :
- La gastronomie : les plats en cabine Business sont signés par des chefs étoilés
- La culture : proposer des contenus de divertissement qui font la promotion des films français (lors du festival de Cannes par exemple)
- Les marques : « tout ce qu’on peut leur offrir à bord doit porter finalement un goût de la France »
Sur la concurrence et notamment vis à vis des low-costs, Anne Rigail a assuré surveiller de près le positionnement des acteurs comme Norwegian. La Directrice Générale d’Air France assure que cette année, la croissance du trafic lié au low-cost est moins importante que les années précédentes.
Le Groupe Air France-KLM peut de plus, se prévaloir d’un atout de taille : Transavia. La compagnie low-cost a récemment annoncé l’ouverture d’une base à Montpellier où elle opérera 14 lignes dès le printemps 2020. Cette croissance est notamment permise grâce aux accords signés avec les syndicats de pilote pour accroître le nombre d’appareils dans la flotte de Transavia, auparavant limitée au nombre de 40.
« Mettre toute son énergie avec les autres acteurs de cette filière pour construire un transport aérien soutenable »
Après avoir évoqué les enjeux économiques auxquels faisaient face Air France, Anne Rigail a abordé un sujet qui est l’une des priorités de la compagnie aérienne française : l’aspect environnemental.
Comme expliqué précédemment, le renouvellement de la flotte joue un rôle important dans l’accomplissement de ces objectifs. Comme un symbole, Air France-KLM a sorti de sa flotte le premier des dix A380 toujours en services. Deux leviers ont ensuite été évoqués par la Directrice Générale :
- Sur des avions à motorisation électrique, « les constructeurs nous disent qu’ils sont assez accessibles mais sur des distances courtes et avec une capacité relativement réduite », et ce d’ici une trentaine d’années. Il apparaît donc compliqué d’imaginer des vols Paris-New York opérés en avion électrique, mais leur potentielle utilisation sur le réseau domestique, « très challengé sur cette question environnementale », n’est pas à écarter.
- Sur la question des pratiques de SAF (Sustainable Aviation Fuel), la question des biocarburants a été soulevée. A l’instar de KLM qui « avec le gouvernement hollandais et des industriels Sky Energy, est en train de créer une filière de biocarburants durables en Hollande », Anne Rigail souhaiterait voir ce schéma reproduit en France. Le rôle de l’état et les différentes aides financières pourraient être des accélérateurs, compte tenu du prix deux à trois fois supérieur du biocarburant par rapport au kérosène classique.
Enfin, si les passagers avaient d’ores et déjà la possibilité de contribuer à la plantation d’arbres dans le monde lors de la réservation d’un billet opéré par Air France, Anne Rigail a annoncé que le partenaire sélectionné, pour permettre la compensation des vols domestiques, allait être prochainement annoncé.
Un plan stratégique de haut vol pour Air France-KLM
Face à une concurrence toujours plus féroce à la fois des compagnies low-cost mais encore et toujours des compagnies historiques, Air France-KLM répond aux enjeux économiques actuels avec un plan stratégique fort visant à améliorer sa marge opérationnelle. Nouveaux appareils, cabines modernes, le client est au centre des priorités de la compagnie aérienne, ambassadrice du savoir-faire français. Air France-KLM se positionne également en chef de file des acteurs aériens mobilisés pour réduire l’empreinte écologique du secteur et faire évoluer les pratiques…